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Gambie : l’ex-président gambien Yahya Jammeh accusé d’avoir volé 11 millions de dollars à l'Etat

Pendant les derniers jours à son poste le président gambien Yahya Jammeh aurait empoché des millions de dollars avant de quitter le pays le 21 janvier, selon un conseiller du nouveau chef d’Etat, Adama Barrow.

Avant de partir en exil, Yahya Jammeh a volé des millions de dollars de l'Etat, a accusé un conseiller de son successeur Adama Barrow, Mai Fatty, le jour même où une mission militaire se déployait pour «sécuriser» le territoire.

«Au moment où nous prenons en main le gouvernement, la Gambie est en détresse financière», a ainsi affirmé Mai Fatty, et «les caisses sont pratiquement vides». Selon lui, «en l'espace de deux semaines, 500 millions de dalasi ont été retirés» par Yahya Jammeh, soit près de 11 millions de dollars.

Adama Barrow, réfugié à Dakar où il a prêté serment le 19 janvier, souhaite rentrer «dès que possible». Mais «la sécurité en Gambie est encore fragile», a souligné son conseiller.

«Ex-dictateur de Gambie»

C'est une certitude, l'opération de la Micega durera jusqu'à ce «que les conditions de l'exercice effectif» du pouvoir de Adama Barrow «soient réunies», a assuré son commandant, le général François Ndiaye. Marcel Alain de Souza, haut responsable de la Cedeao (Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest), a cependant affirmé que le pouvoir ne pourrait pas rester ainsi vacant trop longtemps et selon lui Adama Barrow devra prendre ses fonctions «le plus rapidement possible.

Après six semaines de crise politique grave née du refus de Yahya Jammeh, battu à l'élection présidentielle du 1er décembre, de céder la place à Adama Barrow, les choses commencent cependant à se décanter. Sous d'intenses pressions diplomatiques, notamment de la Cédéao, l'ex-président gambien a finalement accepté de se retirer, après 22 ans de pouvoir, et s'est envolé de Banjul pour Conakry en Guinée. 

Selon des sources officielles guinéennes et la Cédéao, il a ensuite pris un autre avion pour la Guinée équatoriale. Mais les autorités de ce pays n'ont pas confirmé sa présence sur leur sol, alors que le principal parti de l'opposition, la CPDS, a dénoncé la décision d'accueillir «l'ex-dictateur de Gambie».

Depuis l'éclatement, le 9 décembre, de la crise politique gambienne, de multiples initiatives avaient été prises pour que Jammeh cède la place.

Des troupes de la Micega avaient ainsi pénétré en territoire gambien dès le 19 janvier, après la prestation de serment d’Adama Barrow à Dakar, mais elles avaient rapidement suspendu leur progression pour laisser agir la diplomatie, selon la Cédéao, qui comptait alors mobiliser jusqu'à 7 000 hommes de cinq pays.

Et les derniers efforts menés le 20 janvier par la Guinée (membre de la Cédéao) et la Mauritanie (non membre), ont donc finalement abouti. Dans une déclaration commune, la Cédéao, l'Union africaine (UA) et l'ONU ont même annoncé garantir les droits de Yahya Jammeh, y compris à revenir dans son pays, saluant sa «bonne volonté» pour parvenir à un dénouement pacifique de la crise.

«Jammexit»

Selon certains experts auprès de l'AFP, ces garanties ne seraient cependant pas légales. Un haut responsable mauritanien a de même indiqué que Nouakchott avait dénoncé auprès de la Cédéao, de l'UA et de l'ONU l'entrée de «forces étrangères» en territoire gambien. Selon lui, il s'agirait d'une «violation des termes de l'accord» ayant permis le départ en exil de Yahya Jammeh.

Le déploiement des troupes de la Micega semblait en tout cas bien accueilli le 22 janvier par les soldats gambiens et la population, ont constaté des journalistes. Dans la soirée du 22 janvier, les blindés de contingents sénégalais circulaient dans la capitale sous des acclamations, et ce jusqu'aux abords du palais présidentiel où s'aventurent habituellement peu de résidents civils.

Le 21 janvier, les rues de Banjul avaient déjà connu des scènes de liesse après le départ de Yahya Jammeh, qui a dirigé d'une main de fer cette ancienne colonie britannique de moins de deux millions d'habitants.

Sur sa page Facebook, le conseiller d'Adama Barrow, Mai Fatty, a parlé de «Jammexit».

«Bon débarras !», s'est exclamé Mohammed Jallow, 54 ans, tandis que Omar Mbenga a estimé que la Gambie avait obtenu là son «indépendance d'un dictateur terrible».