Selon le quotidien américain New York Times, citant des responsables américaines et alliés, l’équipement serait positionné sur le territoire de chacun des pays baltes : la Lituanie, la Lettonie et l’Estonie, de même qu’en Pologne, en Roumanie, en Bulgarie et, peut-être, en Hongrie. Si cela s’avérait exact, il s’agirait du déploiement le plus sérieux depuis la fin de la Guerre froide ?
Après l’élargissement de l’OTAN aux Pays baltes en 2004, le stationnement permanent d’équipements et de troupes de l’Alliance dans ces pays avait été évité pour tenir compte des intérêts de la Russie. Mais, suite à la crise ukrainienne, l’OTAN et les Etats-Unis ont décidé de renforcer leur présence dans la région pour adresser à la Russie le message que l’Alliance défendra ses membres.
«C’est un changement de politique très significatif. Il rassure les alliés nerveux, même si rien ne vaut un stationnement permanent de troupes, bien sûr», a déclaré James Stavridis, amiral à la retraite et ancien commandant suprême des forces alliées de l’OTAN.
Les stocks d’armes lourdes seraient suffisants pour équiper une brigade de 3 000 à 5 000 soldats et c’est à peu près ce que le Pentagone avait laissé au Koweït après son invasion par l’Irak en 1990. Mais un temps considérable risque de s’écouler avant que ce projet ne devienne réalité car il demande l’approbation du secrétaire à la Défense Ashton Carter et de la Maison Blanche. Ce plan a également suscité l’inquiétude d’autres membres de l’OTAN qui s’inquiète de la réaction que pourrait avoir la Russie face à ce déploiement.
De plus, de hauts responsables de pays qui ont rejoint l’OTAN récemment ont demandé par courrier à l’Alliance à ce qu’elle déploie également de troupes sur leur territoire.
«Nous avons besoin de pré-positionner des équipements et des munitions parce que si quelque chose arrive, nous aurons besoin d’armes, d’équipements et de munitions supplémentaires. Si quelque chose arrivait, on n’aurait pas le temps d’attendre des jours ou des semaines pour de nouveaux équipements. On a besoin de réagir immédiatement», a rapporté Raimonds Vejonis, l’actuel ministre de la Défense letton qui deviendra président en juillet prochain.
Selon l’agence Reuters, le ministre de la défense lituanien Juozas Olekas a aussi fait savoir que Vilnius se préparait à accueillir des armes lourdes américaines. Des pourparlers sont en cours avec Washington sur la localisation permanentes d’armes. «Nous pensons qu’au moins une partie d’entre elles [Abrams et Bradleys] arriveront en Lituanie et nous sommes en train de préparer notre infrastructure militaire, donc, ça peut être utilisé pour un tel pré-positionnement», a déclaré le ministre lituanien.
«Nous avons discuté avec nos alliés américaines du positionnement d’équipements ici sur une base permanente pour renforcer notre sécurité et appuyer les soldats déployés ici», a-t-il ajouté avant de conclure : «Une fois la décision prise, elle sera très positive pour notre sécurité».
Quant au ministre de la Défense estonien, Sven Mikser, il a reconnu que la proposition américaine serait discutée avec les pays de l’OTAN les 24 et 25 juin.
Le New York Times cite Mark Galeotti, professeur de l’Université de New-York, qui s’est abondamment exprimé au sujet des services militaires et de sécurité en Russie et qui a noté que «les chars sur le terrain, même s’il n y a pas de gens à l’intérieur, sont un marqueur important». Un porte-parole du Pentagone a toutefois souligné qu’aucune décision n’avait été prise sur la question.
Depuis que la Crimée a été rattachée à la Russie et que Kiev a lancé son opération militaire dans l’Est du pays le printemps dernier, les forces de l’OTAN ont intensifié les exercices militaires le long de la frontière russe, au sein des Pays baltes et l’Europe de l’Est. La semaine dernière, le président russe Vladimir Poutine a une nouvelle fois répété que la Russie n’était pas un agresseur et qu’elle n’avait pas l’intention de déployer ses capacités militaires à l’étranger ; sa seule intention est de répondre aux menaces de sécurité engendrées par l’expansion militaire de l’OTAN et des Etats-Unis près de sa frontière.
«Je crois que seul un fou, et seulement dans un rêve, peut imaginer que la Russie attaque soudainement l’OTAN. Il me semble que certains pays tirent simplement profit des craintes des gens par rapport à la Russie», a fait remarquer Poutine dans une interview au journal italien Corriere della sera.
Moscou s’est toutefois prononcé à plusieurs reprises contre l’élargissement de l’OTAN le long de ses frontières occidentales, en disant que de telles évolutions menacent la sécurité russe et créent de l’instabilité dans la région.