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Obama et la question noire : huit ans d'incantation... et un testament

Porté par un immense espoir, fort du slogan «Yes We Can», Barack Obama a eu à sa disposition tous les leviers pour faire promouvoir les droits des minorités. Au terme de sa présidence, après le possible, Barack Obama n'exprime plus que des regrets.

«On ne peut pas nier la permanence du racisme». Tels sont les mots de Barack Obama, premier président noir de l'histoire des Etats-Unis après huit ans aux commandes. Un racisme qui explique l'«inégalité» de «tant d'Américains» face au «système judiciaire», explique le président sortant dans un essai paru dans la prestigieuse Harvard Law Review ce 5 janvier 2017.

Pour Barack Obama, c'est bien le temps des bilans. Comme lors de ses derniers vœux pour la nouvelle année, Barack Obama articule dans une dialectique subtile des constats contradictoires, affirmant dans le d'une part, avoir agi et fait avancer l'égalité entre les communautés ethniques et, d'autre part, regretter une situation où injustice et racisme persistent tel un «héritage».

Testament-programme de ce que Barack Obama aurait pu faire

Comme s'il s'apprêtait à un premier mandat, Barack Obama commence en rappelant qu'une présidence est l'occasion d'«exercer un influence substantielle sur le système pénal américain». «Ceux qui ont le privilège de servir comme président continue-t-il, ont l'obligation d'user de cette influence pour améliorer l'équité et l'efficacité du système judiciaire à chacune de ses étapes.»

«Comme candidat à la présidence, j'ai appelé à réduire les inégalités dans les sentences criminelles [...] et formulé des propositions afin d'accorder une seconde chance aux anciens détenus», rappelle-t-il, ajoutant que comme président, il a mis en place «des réformes afin que le système judiciaire soit plus intelligent, plus juste et plus efficace».

Des statistiques accablantes

Huit ans après, la situation n'a pas changé. Par certains aspects, on pourrait considérer qu'elle a même empiré, à l'exemple de Baltimore, qui n'avait pas connu d'émeutes depuis 1968 et qui s'enflamme après la mort du jeune Freddie Gray lors d'un contrôle de Police en avril 2015. Une ville qui rejoint la longue liste des Ferguson, Chicago, Charlotte, Cleveland, Dallas et d'autres. En huit ans, le «Yes We Can» a laissé la place à l'appel – au rappel ultime – de détresse : «Black lives matter» (les vies noires comptent aussi). A l'occasion des troubles de Baltimore, Barack Obama, porteur des espoirs du Mouvement pour les droits civiques avait déclaré, sobrement :

Le pays doit faire un peu d'introspection

En 2015, on comptait 1 146 personnes tuées par la police, selon une compilation effectuée par le Guardian. Statistique qui se ventile de la façon suivante : 307 Noirs, 584 Blancs et 195 Hispaniques, soit une fois rapportés à leur part respective dans la population, 7,69 Noirs tués par million de Noirs, 5,49 Amérindiens par million 3,45 Hispaniques et enfin 2,95 Blancs.

Au terme de la présidence de Barack Obama, un Noir a ainsi 2,5 fois plus de chance de mourir lors d'un contrôle de police qu'un Blanc. Et les Etats-Unis continuent de compter la population carcérale la plus importante de la planète. Barack Obama le souligne lui-même dans son essai pour la Harvard Law Review : «En 1980, il y avait moins d'un demi-million de détenus dans les prisons américaines. Aujourd'hui, le chiffre est estimé à 2,2 millions». 

La question raciale explosive et exacerbée

40 ans après l'assassinat de Martin Luther King, Barack Obama avait en 2008 suscité un immense espoir dans la société américaine. Avec plus de 80% d'opinions favorables, un Congrès américain à majorité démocrate, et quatre ou huit ans devant lui, tout semblait possible pour le 44e président des Etats Unis et ses nombreux fans, à commencer par la communauté afro-américaine.

En juillet 2016, après de nouveaux drames impliquant des victimes afro-américaines et des officiers de police en Louisiane et dans le Minnesota, Barack Obama voyait dans ces événements un «facteur racial»:

«Quand de tels incidents se produisent, nombre de nos citoyens ont le sentiment qu'en raison de la couleur de leur peau, ils ne sont pas traités de la même manière». Mais il tempérait son point de vue en ajoutant : «Ce n'est pas seulement un problème noir. Ce n'est pas un problème hispanique. C'est un problème américain et nous devrions nous en occuper.»

Quelques heures après seulement, cinq officiers de police, quatre blancs et un hispanique, trouvaient la mort dans une ambuscade tendue en représailles par un Noir à Dallas.

Alexandre Keller

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