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Un scrutin majeur sur le TTIP reporté au Parlement européen à cause des «divisions politiques»

Le Parlement européen, au dernier moment, a remis à plus tard un vote sur l’accord dit « TTIP » mardi. Mis sous pression par le mécontentement général, l’organe européen a motivé officiellement sa décision par la quantité d’amendements à examiner.

Le scrutin plénier sur le traité de libre-échange transatlantique (TTIP) a été reporté par le président du parlement européen mardi soir. Le vote sur les négociations n’aura pas lieu «face au fait que plus de 200 amendements et demandes de votes séparés ou par division qui ont été présentées», a annoncé le président du Parlement européen Martin Schulz.

Le scrutin de mercredi devait donner le feu vert à la position de l’UE aux négociations sur le traité de libre-échange avec les Etats-Unis, a rapporté le site Politico. Malgré le fait qu’une résolution du Parlement en soutien à la Commission européenne dans les pourparlers n’est pas indispensable à ce stade, elle est considérée comme importante pour le succès du projet. L’assemblée aurait maintenu le débat sur le TTIP à son ordre du jour de mercredi tout en reportant le scrutin à une date indéterminée.

Un grand nombre de commentateurs politiques réagissent à la décision en déclarant que  «l’establishment du Parlement européen est en panique» sur la résolution du TTIP. Le vote révèlera «les divisions flagrantes au sein de larges groupes sur les négociations controversées entre l’UE et les Etats-Unis», a dit le porte-parole des Verts/Alliance libre européenne Yannick Jadot, ajoutant que le report de la délibération était un moyen d’«empêcher ces divisions de ressortir au grand jour».

Considérant la montée présumée des désaccords sur le projet comme «un volte-face majeure» par rapport au dernier vote au sujet de l’accord il y a deux ans, Yannick Jadot a dit que le report «prouve que la pression citoyenne accrue observée dernièrement est en train de porter ses fruits». Il a ajouté que son parti continuerait à partager ses proccupations au sujet du TTIP.

Lundi, l’initiative citoyenne européenne «Arrêtez le TTIP» a obtenu deux millions de signatures, un nombre record depuis l’introduction de l’instrument juridique par le traité de Lisbonne de 2012.

Le grand nombre de modifications «reflètent juste à quel point ce traité de libre-échange néfaste est devenu controversé et contesté», a dit le directeur de Global Justice Now Nick Dearden mardi. «Les membres du Parlement européen sont au courant que la majorité des Européens ne veut pas de l’établissement de tribunaux d’arbitrage secrets», a-t-il dit.

En mai, Alfred de Zayas, haut fonctionnaire de l’ONU et défenseur des droits de l’homme, a appelé à arrêter les négociations entre l’Europe et les Etats-Unis, exprimant crainte que le système judiciaire privé envisagé par les négociateurs pour régler les litiges liés à l’application du traité contourne le système européen de protection des droits de l’homme. La confédération syndicale britannique GMB a aussi mis en garde le public contre l’accord, prévenant que le Royaume-Uni pourrait être inondé de produits chimiques nuisibles actuellement interdits si la résolution sur le TTIP au parlement était adoptée.

Le TTIP est partie de la fameuse «trinité des traités T», qui comprend aussi le partenariat transpacifique (TPP) et l’accord sur commerce des services (TiSA). La semaine dernière, WikiLeaks a publié un grand nombre de documents secrets liés à ce dernier accord qui a aussi été discuté à huis clos entre les Etats-Unis, l’UE et 20 membres de l’OMC. 

TTIP et TAFTA accompagnent l’expansion des multinationales américaines

Dans une interview à RT, Jack Rasmus, professeur d’économie et de science politique, a expliqué les raisons pour lesquelles Washington désire tant signer des traités de libre-échange avec l’Europe et l’Asie.

«Tout simplement, les Etats-Unis ont un avantage compétitif dans des domaines tels que les logiciels, Internet et autres, et cela permettra aux entreprises américaines de pénétrer plus profondément les marchés de ces pays», a souligné Rasmus.

Compte tenu du fait que les Etats-Unis sont un grand exportateur de services, l’expert explique que les entreprises américaines veulent conforter leur leadership sur la prochaine révolution économique qui «portera sur des modes de production intégrés complètement dépendants des logiciels et autres services informatiques». Les Etats-Unis voient ces traités comme un bon moyen de s’implanter en Europe, conclut le professeur.