«Nous avons entendu la fille et après vérification de tous les détails, nous avons considéré qu’elle était apte au mariage, la preuve : elle est enceinte.» C'est ainsi que les juges du tribunal de première instance de la région du Kef, en Tunisie, ont justifié leur décision, rendue le 13 décembre 2016, d'autoriser le mariage entre une fillette de 13 ans et l'un des membres de sa famille, qui l'a mise enceinte. Dès le lendemain, le ministre de la Justice, Ghazi Jeribi, a annoncé que le ministère public demanderait l'annulation de la décision de justice, qui validait le mariage conclu le 5 décembre dernier.
De nombreuses associations de défense de l'enfance dénoncent un viol pur et simple et ont appelé à manifester ce 14 décembre devant l'Assemblée des représentants du peuple. «Quand il s’agit d’une enfant de 13 ans, on ne peut parler d’un rapport sexuel avec consentement. Il s’agit d’un viol. La décision de justice n’a pas tenu compte de l’intérêt de cette enfant qui va en plus se marier avec son violeur, ce qui constitue une violation de son intégrité physique et mentale», a déclaré la responsable d'une association locale.
Parallèlement, une pétition a été diffusée sur internet depuis l'annonce de la décision, exigeant la suppression de l'article 227 bis du Code pénal tunisien. Celui-ci dispose que toute poursuite contre un violeur est rendue caduque par un contrat de mariage entre celui-ci et sa victime. Sur les réseaux sociaux, de nombreux Tunisiens ont apporté leur soutien à la mobilisation et se sont indignés face à la décision des juges, alors que la Tunisie est traditionnellement perçue comme pionnière dans le domaine des droits des femmes dans le monde arabe.