«Grâce à Fidel Castro, les Cubains ont récupéré leur territoire, leur vie, leur destin : ils se sont inspirés de la Révolution française sans pour autant connaître la Terreur qu'il y a eu pendant la Révolution française». Ces paroles, prononcées par Ségolène Royal devant des journalistes en marge de son voyage à Cuba où elle assistait à l'hommage national rendu à Fidel Castro le 3 décembre, ne sont pas du goût de tout le monde.
Accusée de minimiser les violations des droits de l'homme supposément commises par le régime de Fidel Castro, la ministre, qui était l'un des deux seuls représentants d'un Etat européen à être présent sur place, avec le Premier ministre grec Alexis Tsipras, a dénoncé une «désinformation», rappelant qu'il y a «toujours du positif et du négatif dans une histoire». «Certains ne vont pas se rhabiller à bon compte au nom des droits de l'homme alors qu'on sait qu'ici, quand on demande des listes de prisonniers politiques, on n'en a pas : et bien fournissez-moi des listes de prisonniers politiques, à ce moment-là on pourra faire quelque chose», a-t-elle ajouté.
Les réactions aux déclarations de Ségolène Royal n'ont pas tardé à apparaître dans les médias et sur les réseaux sociaux, notamment de la part des responsables politiques de droite.
Chez les Républicains (LR), le député Thierry Mariani a dénoncé un «éloge» inapproprié...
... tandis que le sénateur et ancien Premier ministre Jean-Pierre Raffarin a pointé du doigt sur RTL une «faut morale et politique», méritant selon lui le non-renouvellement de la ministre de l'Ecologie lors du remaniement à venir.
François Bayrou a également fortement critiqué les propos de Ségolène Royal, estimant que «cela déstabilise ce qui devrait être la position de la France». Il a établi un parallèle avec ses précédentes déclarations, lors d'un voyage en Chine en 2007, au sujet de la justice chinoise, dont elle avait salué la «rapidité».
Même à gauche, les propos de la ministre ont suscité l'indignation. François de Rugy, candidat à la primaire de la gauche des 22 et 29 janvier prochains, a demandé au chef de l'Etat, François Hollande, de désavouer sa ministre, estimant son discours «contraire aux valeurs de la France».
Juliette Médael, secrétaire d’Etat auprès du Premier ministre, chargée de l'aide aux victimes, a également tenu à se distancier de la vision de Fidel Castro que Ségolène Royal a défendue, affirmant que ce dernier était «loin d'être un parangon de vertu démocratique».
Du côté des socialistes toujours, Jack Lang a ri jaune aux déclarations de Ségolène Royal, se demandant : «avait-elle bu un peu trop de rhum en arrivant à La Havane ?». Plus sérieusement, l'ex-ministre de la Culture de François Mitterrand a jugé que la membre du gouvernement Valls «ni[ait] la réalité» cubaine – à savoir, selon lui, un «régime d'oppression, de répression».
Jean-Luc Mélenchon dit «merci» à Ségolène Royal
En revanche, Jean-Luc Mélenchon, qui avait à plusieurs reprises rejeté les accusations contre Fidel Castro lors d'un hommage appuyé à ce dernier, a tenu à témoigner son soutien à la ministre. «Je dis merci à Ségolène Royal d'avoir, en forçant un peu le trait, rétabli un petit peu l'équilibre», a-t-il déclaré lors d'un meeting.
Ségolène Royal a réagi à cette polémique : «Je pense que cette polémique n'a pas lieu d'être. Le jour des funérailles je pense qu'il y a un respect à avoir à l'égard de tout un peuple et de tout un pays qui est en train justement de s'ouvrir et d'évoluer», a-t-elle déclaré dans un entretien à l'AFP.
L'ancien dirigeant cubain continue à diviser l'opinion dans le monde entier. Récemment, c'est l'hommage élogieux du Premier ministre canadien, Justin Trudeau, qui avait suscité l'indignation générale. Si certains saluent en lui un leader ayant œuvré au développement de son pays et au bien-être de son peuple, tout en tenant tête aux Etats-Unis dans un contexte d'embargo économique difficile, d'autres estiment que son régime était avant tout une dictature répressive fondée sur la persécution des opposants politiques, et dénoncent les violations des droits de l'homme dont son régime se serait rendu coupable.