Depuis le 2 décembre au soir et durant trois semaines, le site Mediapart assurera la publication des documents de «Football Leaks». Il s'agit de 18,6 millions de documents confidentiels sur le modèle des Panama Papers qui avaient révélé les pratiques d'évasion fiscales de nombreuses personnalités de tous bords.
Dans cette nouvelle affaire de révélations, les premiers grands noms incriminés, sont l'attaquant portugais du Real Madrid, Cristiano Ronaldo, le coach portugais de Manchester United (MU) José Mourinho et l'attaquant colombien de Monaco, Radamel Falcao. Tous font partie du portefeuille du super-agent du foot portugais Jorge Mendes, également mis en cause et qui conteste ces accusations.
Ce dernier avait vu le coup venir, car il avait fait publier dès la matinée du 2 décembre, via sa société Gestifute, un communiqué assurant que Cristiano Ronaldo et José Mourinho respectaient «pleinement leurs obligations fiscales vis-à-vis des autorités espagnoles et britanniques». Gestifute se plaignait d'avoir été interrogée de façon «insidieuse» par un consortium de médias.
Ce dernier, l'«European Investigative Collaborations» (EIC), accuse l'attaquant portugais, grand favori pour le prochain Ballon d'Or, d'avoir «dissimulé 150 millions d'euros dans des paradis fiscaux, grâce à des montages offshore passant par la Suisse et les Iles Vierges britanniques».
Les documents exploités par l'EIC, obtenus au départ par l'hebdomadaire allemand Der Spiegel, montreraient comment CR7 «a encaissé, en toute discrétion, un total de 149,5 millions d'euros de revenus de sponsoring dans des paradis fiscaux ces sept dernières années [...] Sur cette fortune, l'attaquant n'a payé que 5,6 millions d'euros d'impôts. Soit à peine 4% et sans être poursuivi pénalement», affirme l'EIC.
Système de dissimulation
L'enquête «Football Leaks» dénonce aussi «les rouages du système de dissimulation fiscale mis en place» selon elle par l'agent des accusés pour «soustraire au moins 185 millions d'euros de revenus de sponsoring à la vue des administrations fiscales, via un réseau de société écrans et de comptes offshore en Irlande, aux Iles Vierges Britanniques, au Panama et en Suisse».
L'EIC accuse aussi José Mourinho d'avoir «dissimulé 12 millions d'euros au fisc, logés sur un compte suisse détenu par une société écran immatriculée aux Iles Vierges britanniques».
Ni Cristiano Ronaldo, ni José Mourinho «n'ont été impliqués dans des procédures judiciaires de la commission de fraude fiscale», avait contesté par anticipation Gestifute dans son communiqué.
Pourtant, «un contrôle fiscal a été lancé sur les revenus 2011-13» du joueur du Real Madrid et, selon ses avocats, «une inspection du fisc espagnol» est «toujours en cours», assure l'EIC. Pourquoi ? Le Portugais a «touché, entre 2009 et 2014, 74,8 millions d'euros via une société offshore [...] immatriculée aux Iles Vierges Britanniques, sans en parler au fisc» mais «de peur d'être découvert, il a fini par en déclarer une partie».
Comptes de Falcao
L'EIC soutient aussi que «le 20 décembre 2014, Ronaldo a vendu pour 74,7 millions d'euros ses droits marketing pour les années 2015-20» afin de «profiter d’un régime fiscal ultra-avantageux qui allait disparaître douze jours plus tard». Le Portugais aurait ainsi «éludé 31 millions d’euros d'impôts».
Ces accusations tombent alors que Cristiano Ronaldo jouera le 3 décembre avec le Real face à Barcelone, le «clasico» certainement le plus attendu au monde.
Dans son communiqué, Gestifute ne mentionne pas le colombien Radamael Falcao, également ciblé par l'EIC. Pendant la période 2011-13 [il jouait alors à l'Atletico Madrid], il aurait notamment «encaissé 1,3 million d'euros sur un compte suisse détenu par une société aux Iles Vierges, versés, via les sociétés irlandaises du système Mendes», par différents sponsors et équipementiers.
Radamael Falcao détient aussi, selon l'EIC, «en tant que personne physique, 2,2 millions de dollars sur un compte à Miami et 8,5 millions d'euros sur son compte à Monaco, sans compter les avoirs d'un trust en Colombie».
Outre Mediapart en France, le projet «Football Leaks» rassemble Der Spiegel (Allemagne), The Sunday Times (Royaume-Uni), Expresso (Portugal), El Mundo (Espagne), L'Espresso (Italie), Le Soir (Belgique), NRC Handelsblad (Pays-Bas), Politiken (Danemark), Falter (Autriche), Newsweek Serbia (Serbie) et The Black Sea, média en ligne créé par le Centre roumain pour le journalisme d'investigation.