Mohamed El-Ghirani, ministre des Affaires étrangères du «gouvernement de salut public» basé à Tripoli et établi par les milices qui tiennent la capitale libyenne, a prévenu l’Europe du risque de se voir «envahie» par les migrants africains si elle ne coopère pas avec son gouvernement.
Des migrants africains fuyant le chaos ambiant continueront à affluer vers l’Europe jusqu’à ce que l’Union européenne ne prenne les mesures d'urgence qui s'imposent, a averti le haut fonctionnaire.
Le responsable demande la reconnaissance internationale de son gouvernement ainsi que l’aide de Bruxelles. «Nous vous disons : venez, parlez et coopérez avec nous, le gouvernement de salut national», a dit le ministre de Tripoli dans une interview à Reuters, appelant les dirigeants européens à réagir.
«Si l’Europe ne coopère pas, alors l’Europe sera complètement noire dans quelques années. L’Europe passera d’une Europe blanche à une Europe noire», a poursuivi Mohamed El-Ghirani.
Guerre civile, migrations illégales et trafic d'êtres humains
Pendant ce temps, la guerre civile continue à faire rage entre les deux gouvernements rivaux, causant migrations illégales et trafic d'êtres humains. Certaines régions du pays sont entièrement contrôlées par des milices djihadistes, tous les indicateurs économiques sont en chute libre.
El-Ghirani a indiqué que la Libye abrite plus de 16 000 migrants clandestins dans des centres de rétention surpeuplés. Certains sont hébergés dans des écoles abandonnées ou d'autres établissements publics. La Libye est une plateforme centrale pour les migrants africains qui fuient pour l’Europe à la recherche d’une vie meilleure.
L’année dernière, au moins 170 000 migrants ont traversé la Méditerranée depuis la Libye, plus de 3 000 se sont noyés en mer. D’après les estimations de l’Organisation internationale pour les migrations, ces chiffres risquent d’augmenter encore cette année.
Le fardeau financier causé par l’afflux croissant de migrants commence déjà à peser sur l’Union européenne qui propose de répartir l'accueil entre les différents Etats membres. Autre problème : certains migrants s’avèrent avoir un passé criminel. Le secrétaire général de l'OTAN Jens Stoltenberg a averti que «des terroristes et des djihadistes peuvent se mêler aux migrants qui tentent de traverser la Méditerranée».
L’intégration des réfugiés africains dans les sociétés européennes est un défi pour les autorités des pays hôtes. A tel point que l’afflux croissant de migrants provoque un tollé et inquiète certains dirigeants européens prompts à préconiser des expulsions massives. «Les gens en ont marre de ce système qui permet à ceux qui ne doivent pas être dans notre pays de rester», a dit David Cameron, Premier ministre britannique.
Une catastrophe humanitaire engendrée par l’Occident
Chez Amnesty International, on estime que les gouvernements occidentaux ignorent les causes de la crise. «La communauté internationale a regardé la Libye s’enfoncer dans le chaos depuis la fin de l’intervention militaire menée par l’OTAN en 2011, ce qui a permis aux milices et aux groupes armés d’échapper à tout contrôle. Les dirigeants du monde doivent assumer leurs responsabilités et accepter les conséquences, notamment le flux de réfugiés et de migrants fuyant le conflit en Libye», a déclaré Philip Luther, directeur du programme Afrique du Nord et Moyen-Orient d’Amnesty International.
Ainsi, l’opération navale planifiée par l’UE comprend un travail de renseignement sur les réseaux de passeurs, des campagnes de frappes aériennes et des activités terrestres qui pourraient inclure des opérations le long de la côte libyenne, dans les ports ou au large à l'encontre des navires et autres équipements des trafiquants avant qu’ils soient utilisés. Cela pourrait signifier l’envoi de troupes européennes sur le terrain.
Cependant, l’analyste politique Gearoid O'Colmain doute des bonnes intentions de l’Occident qui, d’après lui, a délibérément détruit la Libye et «consciemment engendré une vraie catastrophe humanitaire» ainsi qu'un chaos généralisé dans le pays.
«Les Etats-Unis et l’Europe ne souhaitent pas la paix et la stabilité dans le Tiers monde, la politique européenne en Afrique est synonyme de destruction, de militarisation, d’occupation militaire, elle consiste à entraver le développement du continent africain», a-t-il souligné dans une interview à RT.