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Brexit : en quête de passeports, les Britanniques recherchent leurs ancêtres européens

Par peur des conséquences de la sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne, de plus en plus de Britanniques se mettent en tête d’obtenir une double nationalité. Se redécouvrir un ancêtre issu d’un des 27 Etats membres est devenu un sport national.

«J'avais songé à demander la nationalité irlandaise avant le référendum, mais je ne l'aurais pas fait si on n'avait pas voté pour sortir de l'UE. J'aurais trouvé ça malhonnête.» La journaliste anglaise Johanna Derry, à l’instar de bon nombre de ses concitoyens, a commencé à rassembler les documents nécessaires à l’obtention du passeport orné de la harpe celtique. Depuis qu'outre-Manche, on a décidé de sortir de l'Union européenne, des milliers de citoyens britanniques se sont mis en quête d'une double-nationalité leur permettant de faire fi des effets du Brexit.

«Je me sens européenne, donc pour moi ça a du sens de faire ça pour pouvoir rester européenne», argumente Johanna Derry. «On m'a accusé de trahir mes racines anglaises... mais la culture irlandaise est très présente dans ma famille, donc ça ne m'atteint pas.»

Environ 10% des Britanniques sont éligibles à la nationalité irlandaise. Et Dublin est prête à l’accorder jusqu’aux petits-enfants de ses ressortissants.

Les incertitudes quant aux conséquences du Brexit ont fait bondir les demandes auprès du «Foreign Births Register» irlandais. Jusqu’à submerger les effectifs. Le ministre des Affaires étrangères irlandais, Charlie Flanagan, a même dû prendre la parole. Il a appelé à la patience tout en rappelant que les bureaux consulaires étaient sous «forte pression».

D’autres pays concernés

Les descendants d’Irlandais sont loin d’être les seuls à tout faire pour contourner le Brexit. L’ambassade d’Allemagne à Londres a fait savoir qu’au lendemain du vote, elle avait reçu un «pic des demandes de renseignements».

Parfois, les chancelleries européennes ont même droit à des demandes plus… surprenantes. Quelques 400 descendants britanniques de juifs séfarades, expulsés du Portugal il y a cinq siècles, ont sollicité la nationalité du petit Etat ibérique.

Depuis mars 2015, une loi les autorise à acquérir un passeport portugais en guise de réparation pour les persécutions subies par leurs ancêtres à la fin du XVe siècle. Mais avant le référendum sur le Brexit, seul cinq Britanniques avaient demandé à en bénéficier.

Michael Rothwell, un porte-parole de la communauté juive de Porto, explique recevoir «une dizaine de demandes de renseignements par jour».

Et pour ceux qui n’ont pas d'ascendance connue, il reste le site de généalogie ancestry.co.uk. «Nous avons vu le nombre d'internautes souscrivant à des périodes d'essai grimper de 40%. Et en parallèle, sur une semaine, les recherches concernant des ancêtres irlandais ont augmenté de 20%», explique Sue Moncur, l'un des responsables du site.

L’option matrimoniale

A ceux qui ne peuvent jouer la carte de l’ancêtre européen, il reste une issue : le mariage. Les Britanniques mariés à des Européens conserveront le droit de vivre et travailler sur le continent.

Un détail d’importance qui a donné des idées à des cerveaux plein d’idées. C’est le cas de deux étudiantes, Katy Edelsten et Chloe Cordon, qui ont créé le site idbenothingwithouteu.co.uk. Il propose de mettre en relation des Britanniques et de «charmants citoyens européens vivant au Royaume-Uni». Il revendique déjà plusieurs milliers de membres.

Selon ses créatrices, pas question d’encourager des unions de circonstances. «Personne ne souhaite se marier juste pour un passeport. C'est juste une manière amusante de faire des rencontres. Il y a plein de façons de trouver l'amour, alors pourquoi pas grâce au Brexit ?», interroge Katy Edelsten. La jeune femme souhaite maintenant étendre son concept aux Britanniques installés sur le continent.

En savoir plus : Brexit : 140 ans pour enregistrer tous les Européens vivant au Royaume-Uni ?

Elle ne cache pas la visée pro-européenne de l’entreprise : «Notre but ultime est que des gens tombent vraiment amoureux et que nous devions célébrer un mariage de groupe avec des bagues et des gâteaux à l'effigie de l'Union européenne.» A Bruxelles ?