C'est au petit matin après deux journées de combats intenses que le général putschiste Godefroid Niyombare a finalement annoncé sa reddition à l'AFP par téléphone: "Nous avons décidé de nous rendre. J'espère qu'ils ne vont pas nous tuer". Le pays est à l'heure actuelle toujours en proie à une certaine confusion. Le point sur la situation.
Où sont les putschistes et le Président ?
Depuis sa déclaration à l'aube, il semble que le leader du mouvement mutin soit en fuite. La police le traque dans les quartiers sud de la capitale Bujumbura.
Plusieurs de ses proches ont en revanche été arrêtés. Il s'agit du général Cyrille Ndayirukiye, ex-ministre de la défense du Burundi, et deux commissaires dont le porte-parole des putschistes.
Quant au président Pierre Nkurunziza, certaines sources affirment qu'il serait rentré au Burundi, caché pour le moment dans un lieu sécurisé de la capitale. Il pourrait s'exprimer dans la journée.
Que s'est-il passé ?
Le général Niyombare, ex-patron des Renseignements, a profité du départ du président Nkurunziza mercredi en Tanzanie où il devait assister à un sommet régional, pour lancer son coup de force. Pendant deux journées, d'intenses combats à l'arme lourde ont secoué la capitale. Les mutins, après avoir fermé les aéroports du pays, ont tenté de prendre le contrôle de la radio-télévision nationale burundaise et de la radio publique africaine.
Ces bâtiments, hautement stratégiques pour gérer la communication dans le pays, ont été défendus par le chef d'état major des forces armées, Prime Niyongabo. Ce dernier s'est donc rangé dans le camp des loyalistes, permettant ainsi de faire avorter le coup d'état.
La rébellion n'a reçu le soutien ni des Etats-Unis, ni du conseil de Sécurité des Nations Unies.
Pourquoi cette rébellion ?
Depuis l'annonce, fin avril, de la volonté du président Pierre Nkurumziza de briguer un troisième mandat (il a été élu en 2005 et en 2010 à la tête du pays) les rues burundaises se sont enflammées. Des manifestations quotidiennes ont été organisées pour dénoncer l'attitude anti-constitutionnelle du Président, la législation en vigeur limitant à deux le nombre de mandats consécutifs. Si la cour constitutionnelle a fini par trancher en faveur du Président Nkurumziza, les opposant dénoncent des pressions exercées sur cette dernière.
Le général mutin Niyombare, ex-compagnon de route du Président burundais, s'est rendu très populaire dans le pays en lui conseillant de renoncer à ce troisième mandat. Face à son refus, il a rejoint les rangs de l'opposition.
Vers une nouvelle guerre civile ?
Le Burundi est un pays fragile qui sort tout juste d'une longue guerre civile à caractère ethnique (1993-2005), qui a vu se déchirer les peuple hutus (80% de la population) et tutsis. L'histoire de ce petit pays africain est ainsi marqué par un terrible génocide du peuple hutu en 1972 (200 000 morts) perpétré par l'armée burundaise, dominée alors par les tutsis. Ce massacre donnera le coup d'envoi à un cycle infernal de vengeances pendant plusieurs décennies.
Depuis l'accord de paix signée en 2005, les deux ethnies se partagent le pouvoir. Certains observateurs craignent que la volonté affichée du président hutu Nkurumziza de se maintenir à la tête du pays ne ravive ces vieilles tensions ethniques.