International

La Russie met en garde contre de possibles «incidents» dans les centrales nucléaires en Ukraine

Un haut diplomate russe a indiqué mardi 21 juin que la Russie craignait des «incidents» dans les centrales nucléaires ukrainiennes qui ont remplacé leur alimentation en combustible russe pour du carburant du groupe américain Westinghouse.

«A l'heure actuelle, des doutes fondés subsistent quant à la capacité des producteurs étrangers, dont Westinghouse, à fournir du combustible pouvant faire fonctionner sans incident les réacteurs de conception soviétique et russe», a déclaré Mikhaïl Oulianov, directeur du département chargé du contrôle des armements au ministère russe des Affaires étrangères, à l'agence publique RIA Novosti.

«Dans le passé, les tentatives de charger en combustible de production non-russe des réacteurs que nous avons conçus, y compris dans des centrales ukrainiennes, ont conduit à plusieurs reprises à des défaillances», a-t-il ajouté.

Le diplomate russe a par ailleurs souligné que les risques étaient d’autant plus importants que les autorités ukrainiennes avaient pris selon lui des mesures de régulation prévoyant des baisses de production d'électricité, ce qui est «très dangereux car les réacteurs ne sont pas prévus pour une telle exploitation [et les risques] augmentent avec la possible présence de combustible expérimental étranger» a-t-il expliqué.

Un risque qui ne date pas d'aujourd'hui

L'Ukraine a enregistré des problèmes de fonctionnement des ensembles de cartouches TBC-W au printemps 2012 et en 2013, lors de travaux d'entretien à la centrale nucléaire Ukraine du Sud. Les problèmes étaient provoqués par une défaillance technique du combustible de Westinghouse. Il avait d’ailleurs été rapporté que, dans cette centrale, des expérimentations de combustible américain, entamées en 2005, avaient dû être suspendues en 2012 après la découverte de défauts de fonctionnement lors d'une opération de maintenance. Elles avaient repris en 2014.

La même année, le vice-président de l’Union internationale des vétérans du nucléaire civil, Evguéni Akimov, avait expliqué que les centrales nucléaires ukrainiennes étaient dotées de réacteurs de fabrication russe et conçues pour utiliser du combustible fabriqué à Elektrosal, en Russie. En conséquence, les barres de combustibles de fabrication américaine ne conviendraient pas à ces réacteurs, selon ses propos recueillis par RIA Novosti. «Qu'est-ce qui arrive si vous mettez du combustible diesel dans un moteur essence ? Votre véhicule ne marchera plus. Et maintenant imaginez un réacteur nucléaire», avait-il conclu.

En août 2015, les autorités ukrainiennes avaient annoncé des fuites d’eau radioactive dans l’Ouest du pays. Selon les experts, un combustible nucléaire mal adapté était à l’origine de l’incident. La même année, la centrale nucléaire de Zaporojie avait déjà subi trois pannes importantes. La dernière s’étant produite le 18 juillet en raison de l’arrêt de la pompe de refroidissement du réacteur numéro 1 de la centrale.

Mais malgré les avertissements des experts, les autorités ukrainiennes continuent de fermer les yeux et qualifient ces mises en garde d'«infondées», a dénoncé Sergueï Boïko, directeur de l'inspection du secteur nucléaire, dans un communiqué transmis à l'AFP.

La majorité des centrales nucléaires du pays ont été construites du temps de l’Union soviétique, dont celle de Zaporojie, qui reste la plus grande d’Europe. Mais compte tenu des tensions politiques actuelles avec la Russie, le gouvernement ukrainien préfère acheter du combustible nucléaire auprès de ses partenaires occidentaux. Le 30 décembre 2014, l’Ukraine a notamment signé un accord avec la société américaine Westinghouse qui lui livrera du combustible en dépit des rumeurs qui prétendent que son combustible est de mauvaise qualité et qu’il n’est pas conforme aux standards internationaux.

L'Ukraine compte quatre centrales nucléaires - Zaporojie, Khmelnitski, Rovno et Ukraine du Sud.