«Bout était à l’époque vendeur d’armes mais au moment de son arrestation il s’était pratiquement retiré», a confié dans son interview au New York Times la juge fédérale américaine Shira Sheindlin, qui l’a condamné à sa peine de prison en 2012.
«Je ne le défends pas», a-t-elle poursuivi. «Mais c’est un businessman. Il a exercé des activités de vente d’armes». Il n’était pas combattant ou terroriste d’Al-Qaïda «qui vit pour faire exploser des civils dans un supermarché», a-t-elle conclu.
Le singulier homme d’affaires a été abordé par des agents de la DEA, service américain chargé de la mise en application de la loi sur les stupéfiants et de la lutte contre leur trafic, qui se sont présentés comme membres des Forces armées révolutionnaires de Colombie (FARC). Ils ont négocié un accord de vente de missiles sol-air, explosifs et mitrailleuses. Viktor Bout a été ensuite arrêté par les autorités thaïlandaises et extradé vers les Etats-Unis pour y être jugé. Les enregistrements des négociations ont servi de preuve à charge dans ce dossier.
Le jury a décidé que Viktor Bout était conscient que les armes qu’il fournissait seraient utilisées pour tuer des citoyens américains et qu’il était coupable de complot. Les procureurs ont appelé à le condamner à la perpétuité, mais la juge Scheindlin a estimé qu’il n’y avait aucune preuve que l’accusé aurait fauté si on ne lui avait pas tendu un piège.
«Ils ont attiré l’attention de cet homme. Ils lui ont offert beaucoup d’argent», a-t-elle souligné au New York Times, ajoutant lui avoir adjugé la peine la moins lourde possible.
«Vous les attirez par l’argent réel et les avantages», a estimé Scheindlin et les hommes finissent par se condamner eux-mêmes» avec des déclarations incriminantes. «Mais, vous sentez en quelque sorte que s’ils n’avaient pas été abordés, ils n’auraient pas l’idée, ni les moyens de le faire».
Les propos de la juge confirment «que l’affaire a été fomentée par les services secrets et les procureurs sous la législation antiterroriste américaine», a expliqué Alla à RIA Novosti, la femme de Viktor Bout.
«Femme de principes et indépendante, la juge a été forcée de choisir entre une peine de 25 ans et la perpétuité, mais ne pouvait aller en deçà, bien qu’elle comprenait que la punition qu’elle a dû lui imposer était inadéquate par rapport à ce qu’il a fait, selon les procureurs et le jury», a précisé Alla.
La juge Scheindlin est connue pour son verdict de 2013, selon lequel la célèbre politique new-yorkaise de contrôle et de fouille violait les droits des minorités. Elle s’apprête actuellement à quitter ses fonctions après avoir servi 22 ans en tant que juge fédéral à Manhattan.