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L’Union européenne souhaite prévenir l'immigration clandestine en éliminant les bateaux des passeurs

A l’issue du sommet européen extraordinaire de Bruxelles jeudi, le président français François Hollande a annoncé que la France allait proposer une résolution à l’ONU l'autorisant à éliminer les bateaux des passeurs de migrants en Méditerranée.

Préoccupé par le flux de migrants clandestins en provenance d'Afrique du Nord vers l’Europe au péril de leur vie, le président français a décidé de s’adresser à l’ONU pour s'attaquer aux navires des passeurs.

«La décision a été prise de présenter toutes les options pour que les navires puissent être appréhendés, annihilés», a déclaré le président français après le sommet mis sur pied en raison de la répétition de naufrages dramatiques de bateaux remplis de migrants en Méditerranée ces dernières semaines.

«Cela ne peut se faire que dans le cadre d'une résolution du Conseil de sécurité et la France prendra une initiative, avec d'autres», a-t-il ajouté. Le projet de résolution sera discuté entre François Hollande et Vladimir Poutine en Arménie, où les deux hommes assistent aux cérémonies du centenaire du génocide arménien par l’Empire ottoman.

Renforcement de mesures de surveillance en Méditerranée

Lors de ce sommet, l’UE a décidé de tripler le budget de son opération de surveillance «Triton» conduite par l’agence Frontex chargée de la sécurité et des frontières extérieures.

La France, l’Allemagne, la Belgique et le Royaume-Uni sont allés plus loin dans leur intention de faire cesser le flux de migrants en mettant plus de navires à la disposition de Frontex.

Paris enverra en haute mer un patrouilleur, un remorqueur et doublera le nombre de ses experts engagés sur le terrain, a indiqué le président François Hollande, tandis que l’Allemagne est prête à envoyer deux navires de plus et la Belgique un supplémentaire. Le Royaume-Uni a soutenu l’idée et fournira une aide composée de trois navires et de trois hélicoptères.

Malgré l’augmentation du budget de «Triton» qui passe de 3 à 9 millions d’euros, l’UE n’a pas élargi son champ opérationnel. Cela veut dire que Frontex n’aura pas le droit de sortir des eaux territoriales ni d’aller plus près de la Libye, même si cette question a été abordée pendant les négociations.

L'opération de soutien et d’accompagnement «Triton» a été lancée pour succéder à l’opération Mare Nostrum, à la demande expresse de l'Italie. Si Mare Nostrum avait pour but de secourir en mer les immigrés clandestins et déployait son action jusqu'aux côtes libyennes, «Triton» vise avant tout le contrôle des frontières et reste limitée aux eaux territoriales européennes. Mare Nostrum ne pouvait pas empêcher les migrants d’essayer d’atteindre l’Italie, raison pour laquelle il est question d’étendre le rayon d’action de l’opération «Triton».

La répartition des migrants

En revanche, les Etats membres de l’UE ne sont pas parvenus à se mettre d’accord sur le nombre de migrants que l’Union peut accueillir. Ils pensent que «5 000 n’est pas un nombre suffisant» et envisagent de poursuivre les discussions à ce sujet.

Cependant, le Premier ministre britannique a rejeté l’idée de voir arriver de nouveaux migrants au Royaume-Uni et préfère que l’Italie, qui accueille déjà la plupart des migrants partis des côtes africaines à destination de l’Europe, porte ce fardeau.

«Les gens que nous repêcherons seront emmenés vers le pays sûr le plus proche, le plus probablement l'Italie. Ils n’auront donc pas l’occasion de demander l’asile en Grande-Bretagne», a-t-il affirmé aux journalistes à Bruxelles.

Mais l’antimilitariste britannique Mike Raddie s'est offusqué des propos de son Premier ministre. «Nous avons détruits ces pays, leur infrastructure, l’avenir de leurs enfants et nous ne faisons absolument rien pour les aider», a déclaré Mike Raddie sur les ondes de RT.

De plus, l’intéressé a souligné un paradoxe : des millions de personnes fuient en réalité les régions où les troupes de l’OTAN, britanniques et américaines sont envoyées pour soi-disant, faire triompher la liberté et la démocratie. Ils préfèrent aujourd’hui risquer leur vie en traversant la Méditerranée tellement leurs conditions de vie sont devenues problématiques.

Les erreurs du passé

A la distinction de la tolérance zéro prônée par David Cameron, certains responsables européens, y compris le président français, ont donné l’impression d’avoir une approche plus complète de la question. François Hollande a ainsi déclaré qu’il fallait «réparer les erreurs du passé» commises en Libye et lutter contre le chaos qui ravage ce pays à l’heure actuelle.

Le président français a en outre indiqué qu’il ne s’agissait pas de «refaire une intervention» comme celle qui a été déclenchée en 2011 contre la Libye par son prédécesseur, Nicolas Sarkozy, et qui a conduit à la chute du régime de Mouammar Kadhafi.

Le rôle du printemps arabe et de l’intervention en Libye sur le flux de réfugiés

D’après le rapport du Parlement européen, le printemps arabe et l’intervention en Libye ont joué un rôle très important pour expliquer l’afflux de migrants actuels.

En savoir plus : politiques migratoires de l'Union européenne avec ses partenaires méditerranéens

Selon Frontex, sur les neuf premiers mois de 2011, les autorités européennes ont intercepté pratiquement deux fois plus d’immigrés clandestins que sur toute l’année 2010, l'Italie et Malte constituant les principales voies d’accès à l’UE. Selon l’Agence des Nations unies pour les réfugiés, 70 000 migrants ont atteint les côtes de l’Europe en 2011.

En 2014, plus de 170 000 migrants ont traversé la Méditerranée pour atteindre les côtés européennes et 3 000 d'entre eux ont péri. Selon l’Organisation maritime internationale, quelques 500 000 migrants essaieront de traverser la mer Méditerranée cette année.