Adolfo Perez Esquivel, distingué (comme le président américain) par le prix Nobel de la paix, en 1980 pour sa défense des droits de l’Homme sous la dictature argentine de 1976 à 1983, a ainsi publié une lettre ouverte appelant Obama à «ne pas venir le 24 mars», rapporte l’agence de presse Associated Press.
Si l’activiste argentin explique que le président américain est le bienvenu à tout autre moment, il estime cependant que le choix de la date laisse à désirer. En effet, 40 ans auparavant, un coup d'Etat installait au pouvoir une junte militaire qui serait responsable d’au moins 30 000 assassinats et disparitions, selon les chiffres des organisations de défense des droits de l’Homme.
Les Etats-Unis étaient responsables des coups d’Etat en Amérique latine
«Je suis un survivant de cette époque, des vols de la mort, de la torture, des prisons, des exils», rapporte Esquivel, ajoutant : «Quand on analyse la situation en profondeur, les Etats-Unis étaient responsables des coups d’Etat en Amérique latine.»
Ce témoin de la dictature n’est d'ailleurs pas le seul à protester contre la venue de Barack Obama, puisque de nombreux groupes de défense des droits de l’Homme ont fait connaître leur opposition, depuis l’annonce de sa venue il y a plusieurs semaines.
Le chef d'Etat américain «est le faux visage du prix Nobel et nous croyons qu’il y a de nombreuses choses pour lesquelles il devrait payer», explique ainsi Hebe de Bonafini, président de l’association des Mères de la place de Mai, qui enquête sur les disparitions engendrées par la dictature. «Nous ne voulons pas de lui ici», proclame-t-il.
Les opposants à la visite controversée expliquent notamment que, durant la Guerre froide, de nombreuses dictatures militaires ont fleuri dans la région grâce au soutien des Etats-Unis. En particulier, certains font référence à des documents déclassifiés du Département d’Etat indiquant qu’Henry Kissinger, ancien secrétaire d’Etat à la Maison Blanche, avait prôné des techniques de «guerre sale» (usage de la torture, de la répression et d'assassinats) pour atteindre des objectifs politiques.
L’ambassadeur américain en Argentine, Noah Mamet, ne voit lui aucun problème a la visite, estimant que «le gouvernement des Etats-Unis partage avec l’Argentine la défense des droits humains comme principe universel».
Quant au président argentin, Mauricio Macri, un conservateur cherchant à développer les relations avec les Etats-Unis, il a tenté de mettre un terme à la controverse en assurant aux associations que la visite officielle n'empiéterait pas sur les cérémonies de commémoration.
Fixée aux 23 et 24 mars 2016, l'escale de Barack Obama doit suivre sa rencontre avec le dirigeant cubain Raul Castro qui aura lieu les 21 et 22 mars.