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Milice armée contre FBI aux Etats-Unis : le point après plus d'une semaine d'occupation

Cela fait maintenant plus d'une semaine que des hommes armés ont envahi le parc national de Malheur, dans l'Oregon. Une situation irréelle que RT décrypte.

Le 10 janvier, les manifestants armés qui occupent depuis samedi dernier le parc national de Malheur, dans l’Oregon, ont commencé à envisager leur départ. Certains responsables du groupe ont commencé à discuter avec des membres du FBI. Car si la police fédérale n’a toujours pas décidé d’intervenir, ses moyens sur place se font de plus en plus visibles.

Selon Ammon Bundy, leader médiatique de ce groupe, une explosion de violence est la «dernière chose au monde que nous voulons voir arriver». Selon lui, son groupe aurait même demandé le départ des hommes en armes. Reste que la situation reste incroyable en Oregon. Dans les faits, depuis plus d’une semaine, une milice s’est emparée, par les armes, de terres fédérales et d’un parc national. Retour sur un phénomène inquiétant.

Pourquoi cet envahissement du parc national de Malheur ? 

Le 2 janvier, dans une petite ville de l’Oregon au nord-ouest des Etats-Unis, près de 300 personnes manifestent leur soutien à deux hommes : Dwight Hammond et son fils Steven. La justice fédérale vient en effet de décider que cesderniers resteront quatre ans de plus derrière les barreaux après avoir incendié des terres fédérales.

Pour les manifestants, il s’agit d’une injustice et la sentence ne passe pas. Suite à la manifestation, des hommes en armes investissent le parc national de Malheur, qui constitue pour ces hommes le symbole de la trop grande place prise par les terres fédérales dans l’Ouest des Etats-Unis.

Washington est ainsi, depuis la conquête de l’Ouest, propriétaire d’immenses terres (81% du Nevada, 53% de l’Oregon…) et les habitants de ces zones déplorent de ne pas pouvoir les exploiter. C'est l'origine de ces tensions importantes et de la stigmatisation de l'Etat fédéral mais c'est la première fois que la situation dégénère à ce point. 

Qui sont les hommes armés du parc Malheur ?

Ces hommes sont parfois présentés comme des cow-boys tentant de défendre leurs terres face à l'Etat fédéral tout puissant. Mais ce n’est pas si simple. Ces cent hommes forment en effet un groupe très hétérogène : des éleveurs de la région, mais pas seulement. La presse américaine a rapporté que des miliciens étaient venus de l’Utah, du Nevada, de l’Idaho ou du Texas pour défendre une cause dont ils souffrent également chez eux.

Dans ces régions où les terres fédérales sont nombreuses, les autorités ont longtemps délivré aux propriétaires de ranch locaux des permis de pâturage, de coupe de bois ou d'exploitation minière. Mais dans l'Oregon, les protestatires dénoncent la multiplication récente des règlements qui entravent le libre exercice de leur métier, en particulier tout ce qui concerne la protection des écosystèmes.

Les éleveurs notamment, estiment détenir le droit inaliénable de faire paître leur bétail sur les terres fédérales et se braquent à l'idée de devoir payer pour que leurs puissent bénéficier de cet accès. Voilà qui explique pourquoi certains de ces protestataires ont parfois pu faire des milliers de kilomètres pour défendre la cause de la famille Hammond, sans réellement savoir que ces derniers sont des récidivistes qui ont déjà condamnés en 2013 pour avoir incendié des terres fédérales.

Qui sont les frères Bundy, les leaders du mouvement ?

Depuis le début de l’occupation du parc de Malheur, deux noms reviennent très souvent. Ryan et Ammon Bundy. Le second est le porte-parole du mouvement. Et pourtant, il ne vient pas de l’Oregon. Ammon Bundy est un Texan qui s’est fait connaître, en 2014, après avoir pris les armes et menacé d’affronter la police, après son refus de s'acquitter d'une taxe pour accéder aux terres fédérales.

A l’époque déjà, des dizaines de personnes avaient rejoint le ranch des Bundy pour défendre leur cause. Mais les frères Bundy ne sont pas de simples cow-boys qui veulent travailler tranquillement. Ils sont aussi les créateurs d’un mouvement contestataire baptisé «Citoyens pour la liberté constitutionnelle» qui rassemble, pêle mêle, des antifédéralistes, des complotistes, et surtout, des opposants farouches à Barack Obama et à toute régulation des armes à feu.

Dénonçant très souvent la «tyrannie» du gouvernement fédéral, Ammon Bundy, père de six enfants, s’est toujours prononcé pour la résistance armée telle que cette dernière est mentionnée dans le second amendement, qui autorise le port d’une arme à feu pour se défendre contre un éventuel gouvernement tyrannique. 

Depuis son acte de résistance en 2014, Ammon Bundy est devenu un symbole pour les Républicains du Tea Party, comme Ted Cruz ou Rand Paul, deux candidats à la présidence qui espèrent remporter l'investiture du parti. L'aura des Bundy s'était toutefois passablement ternie quand leur père a déclaré que les Afro-Américains seraient mieux lotis s’ils continuaient à travailler comme esclaves pour récolter du coton, plutôt que de toucher des subventions de l’Etat.

Comment réagissent les Etats-Unis ? 

Il semble y avoir deux camps aux Etats-Unis : les pros et les anti miliciens de l’Oregon. Dans un premier temps, les médias ont évité de stigmatiser les hommes armés, mais ils ont finalement été rappelés à l’ordre par les internautes, qui ont fait remarquer que la prudence était moins grande quand les «terroristes» étaient Afro-américains ou musulmans.

Dans l’opinion publique, deux camps s’affrontent sur la cause défendue par les frères Bundy. Certains Républicains les voient comme des «héros», prenant fait et cause pour eux et dénonçant l’emprise de l’Etat fédéral. D’autres, dont certains grands médias, évoquent désormais des «terroristes» pour parler des frères Bundy. Toutefois, ces derniers jours, soutiens et opposants s'accordent pour demander la fin de cette action.

Comment la situation peut-elle se terminer ?

Deux solutions se dessinent. Soit les miliciens quittent le parc national, soit les forces de l’ordre donnent l’assaut. Pour le moment, le FBI semble décidé à faire durer les choses et n’entend pas faire usage de la force, de peur de vivre un nouveau Waco – une fusillade au bilan terrible de 86 morts entre le FBI et une communauté religieuse armée, en 1993.  La police affirme donc vouloir «résoudre pacifiquement la situation».

De l’autre côté, Ammon Bundy a tout d’abord affirmé être prêt à «rester des années en Oregon», se disant même «prêt à tuer et à être tué pour défendre son combat contre l’Etat». Une position qui semblait légèrement varier ces dernier jours, Ammon Bundy expliquant qu’il «y a un temps pour rentrer chez soi» même si «nous ne pensons pas que ce moment est arrivé».

Toutefois, les forces des miliciens s’amenuisent et ils ne seraient plus, selon les autorités américaines, qu’une dizaine. Ammon Bundy a même affirmé le 10 janvier, que le recours à la violence était «la dernière chose souhaitée».