Ces dernières semaines, les forces du Conseil de transition du Sud (CTS) ont étendu leur contrôle sur de vastes zones du sud et de l’est du Yémen, ravivant le spectre d’une partition du pays. Ce mouvement séparatiste s’inscrit dans une histoire longue de fractures politiques entre le Nord et le Sud yéménites.
Avant l’unification de 1990, le Sud formait un État distinct, d’inspiration marxiste, dont les élites ont été marginalisées après la victoire du Nord lors de la guerre civile de 1994. Cette mise à l’écart a nourri un profond ressentiment, cristallisé à partir de 2007 avec l’émergence du Mouvement du Sud, puis militarisé après 2015, lorsque les houthis ont menacé Aden.
Fondé en 2017 par Aïdarous al-Zoubaïdi, ancien gouverneur de la ville, le CTS vise à doter la cause sudiste d’une structure politique et militaire centralisée. Bien qu’intégré en 2022 au Conseil de direction présidentielle reconnu par la communauté internationale, le mouvement conserve une ambition claire : restaurer un État du Sud dans ses frontières d’avant 1990.
Les ambitions d'Abou Dhabi
Son idéologie séparatiste s’appuie sur une base sociale ancrée dans plusieurs gouvernorats méridionaux, mais le CTS reste une coalition hétérogène de chefs tribaux, d’anciens cadres politiques et de milices locales, souvent dominée par des logiques claniques.
Indissociable du CTS, le soutien des Émirats arabes unis est déterminant. Abou Dhabi a financé, armé et formé les forces sudistes afin de sécuriser les routes maritimes stratégiques et de contenir les Frères musulmans, alliés d’une partie du camp gouvernemental. Cette implication a profondément modifié l’équilibre des forces, au prix de tensions croissantes avec l’Arabie saoudite, dont les alliés se sont récemment affrontés au CTS autour de zones pétrolières clés.
Aujourd’hui, le CTS cherche avant tout à consolider ses gains territoriaux, notamment autour des ressources énergétiques et des façades maritimes. S’il affiche désormais des ambitions nationales, sa dépendance au soutien extérieur, ses divisions internes et sa capacité de gouvernance interrogent. Sa montée en puissance rend la partition du Yémen plus crédible, tout en complexifiant toute perspective de règlement durable du conflit.