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Des Gazaouis racontent l’horreur des prisons israéliennes

Les Gazaouis libérés décrivent à L’Orient-Le Jour des tortures extrêmes subies dans les prisons israéliennes, notamment à Sde Teiman : électrocutions, viols, humiliations et privations de soins. Beaucoup ressortent mutilés, psychiquement détruits. De retour dans une enclave dévastée, ils tentent de survivre à leurs blessures visibles et invisibles.

Ils reviennent amaigris, mutilés, hagards. Libérés dans le cadre du cessez-le-feu, des centaines de Gazaouis témoignent de l’enfer traversé dans les prisons israéliennes, dont Sde Teiman, ce camp du Néguev décrit comme un « Guantanamo » par les ONG.

Parmi eux, Jibril al-Safadi, 46 ans, amputé après que sa jambe a « littéralement explosé dans une mare de sang », raconte à L’Orient-Le Jour la spirale de torture, de privation de sommeil et de déshumanisation qu’il a subie. « Ils m’ont électrocuté plusieurs fois, menacé de me violer avec une matraque », confie-t-il, encore incapable de marcher sans aide.

Les récits recueillis dessinent une même mécanique de destruction. Abou Bachir, arrêté à l’hôpital al-Chifa, se souvient des chiens lâchés sur des détenus « pour les violer », scène confirmée par d’autres prisonniers interrogés par L’OLJ. Ahmad Moustafa, journaliste, raconte les nuits où les gardiens « revenaient tabasser ceux qui commençaient à aller mieux ».

Des pratiques héritées des prisons américaines

Tous évoquent la « salle disco » de Sde Teiman : une pièce glacée, musique assourdissante, prisonniers nus attachés à une plateforme, une torture psychologique inspirée des méthodes américaines en Irak, notamment dans la tristement célèbre prison d’Abou Ghraib.

Ces survivants décrivent aussi des privations systématiques : nourriture rationnée, passages à tabac quotidiens, humiliations, viols, menaces contre leurs familles. « Nous étions des numéros, pas des êtres humains », souffle un détenu, interrogé par le quotidien libanais. Beaucoup apprennent à leur libération que des proches ont été tués, d’autres découvrent leur maison pulvérisée. L’un d’eux, totalement désensibilisé, se répète encore : « On nous a brisés pour que plus rien en nous ne résiste. »

Aujourd’hui, ces ex-prisonniers errent entre ruines et tentes de fortune, traumatisés et sans soins. « Je n’arrive plus à dormir. Je pense à tous ceux que j’ai laissés derrière », dit Abou Bachir. Au cœur d’une Gaza dévastée, ils tentent de réapprendre à respirer, mais les sévices qu’ils décrivent, eux, ne cessent de les étouffer.