La Commission européenne prévoit de créer une nouvelle division de renseignement placée directement sous l'autorité de sa présidente Ursula von der Leyen, malgré les réticences des services de renseignement européens, rapporte le Financial Times ce 11 novembre.
La nouvelle structure serait rattachée au secrétariat général de la Commission et recruterait du personnel issu des agences de renseignement nationales. Selon les sources du Financial Times, son rôle serait axé sur le partage de renseignements au sein de l'Union plutôt que sur des opérations clandestines effectuées à l'étranger.
Craintes d’un affaiblissement des services de renseignement
L'UE dispose déjà d'un service de renseignement, le Centre de situation et du renseignement de l'Union européenne (INTCEN), créé après les attentats du 11 septembre 2001 et rattaché au Service européen pour l'action extérieure (SEAE). Selon le quotidien, des responsables de l'INTCEN craignent que le nouveau service d’Ursula von der Leyen ne fasse double emploi avec les fonctions existantes et n'affaiblisse le service extérieur.
Ce projet fait suite à des informations faisant état de tensions et de rivalités bureaucratiques croissantes entre les fonctionnaires de l'UE. Ses détracteurs accusent depuis longtemps Von der Leyen d'avoir un style de leadership « autoritaire » et opaque, lui reprochant de contourner à la fois les États membres et les institutions internes pour centraliser le pouvoir. Cette idée était au cœur des récentes tentatives menées par des membres de l'opposition au Parlement européen pour la destituer.
Les coulisses de la lutte pour le pouvoir d'Ursula von der Leyen
Relevant des tensions internes à Bruxelles, le magazine Foreign Policy a rapporté le mois dernier que Von der Leyen avait progressivement marginalisé la haute représentante de l'UE pour les affaires étrangères, Kaja Kallas, sur des questions diplomatiques clés, notamment les relations avec Washington.
Un autre article publié par Politico affirmait qu'Ursula von der Leyen avait recouru à des manœuvres politiques pour empêcher Martin Selmayr, un adjoint pressenti par Kaja Kallas pour accéder à un poste important au sein du SEAE. La démission de Selmayr de son poste de secrétaire général de la Commission en 2019 a été perçue comme un tournant dans l'ascension de Von der Leyen.
Renforcer les capacités militaires européennes ?
Un porte-parole de la Commission a déclaré au Financial Times que le nouvel organe de renseignement « travaillerait en étroite collaboration avec les services du SEAE ». Cependant, selon ses sources, cette initiative reflète le mécontentement suscité par les performances d’INTCEN depuis l’escalade du conflit ukrainien en 2022.
La création d'un centre de renseignement centralisé s'inscrit dans le cadre plus large de la volonté d'Ursula von der Leyen de renforcer les capacités militaires de l'UE sous l'égide de Bruxelles, une mesure présentée comme une préparation à un éventuel conflit de grande ampleur avec la Russie. Moscou a maintes fois dénoncé cette politique comme étant fondée sur des prémisses erronées.