« La Turquie a été fantastique. Le président Erdogan a été fantastique. » Ces mots de Donald Trump, le 13 octobre, consacrent le rôle décisif d’Ankara dans la conclusion du cessez-le-feu à Gaza. En quelques semaines, la Turquie s’est imposée comme un acteur central du plan de paix américano-israélien, exerçant une pression décisive sur le Hamas grâce à son chef du renseignement, Ibrahim Kalin.
Ce rôle de médiateur, Erdogan entend désormais le transformer en levier diplomatique pour peser sur l’avenir politique et sécuritaire de l’enclave palestinienne. Forte de son positionnement historique de défenseure de la cause palestinienne, Ankara a affiché sa volonté d’intégrer la future Force internationale de stabilisation (ISF) prévue dans le plan Trump.
Tensions entre Ankara et Tel Aviv
Le ministère turc de la Défense s’est dit prêt à « assumer toute mission » à Gaza, arguant de l’expérience du pays dans les opérations de maintien de la paix, de l’OTAN au Liban. Pour Erdogan, cette participation serait à la fois une victoire politique interne — la cause palestinienne étant présentée comme un combat national — et un moyen de restaurer le prestige international de la Turquie.
Mais Israël voit d’un très mauvais œil cette ambition. Le Premier ministre Benjamin Netanyahou a rapidement fixé une ligne rouge : aucune présence militaire turque dans Gaza. Les relations entre Tel Aviv et Ankara, déjà glaciales depuis 2023, se sont encore tendues après les accusations d’Erdogan qualifiant les opérations israéliennes de « génocide ».
Washington, lui, joue les équilibristes : si le vice-président J.D. Vance estime que la Turquie « peut jouer un rôle constructif », le secrétaire d’État Marco Rubio a confirmé qu’Israël aurait un droit de veto sur la composition de l’ISF.
Face à ces blocages, la Turquie pourrait recentrer son implication sur les missions humanitaires et la reconstruction, en coordination avec le Qatar, l’Égypte ou la Jordanie. Une équipe turque de 81 secouristes attend déjà l’autorisation d’entrer dans Gaza, toujours bloquée par les autorités israéliennes. Pour Erdogan, cette bataille de légitimité autour de Gaza illustre un enjeu bien plus large : replacer la Turquie au cœur du jeu moyen-oriental, quitte à défier ses anciens partenaires occidentaux.