Des diplomates américains de haut rang responsables du dossier syrien ont été soudainement démis de leurs fonctions à la fin de la semaine dernière. Selon des sources informées, ces officiels faisaient partie de la Syrian Regional Platform (SRP), l'équivalent de la mission diplomatique américaine en Syrie depuis la fermeture de l'ambassade à Damas en 2012.
Ils relevaient directement de Tom Barrack, l'envoyé spécial des États-Unis pour la Syrie, nommé en mai dernier et proche conseiller du président Donald Trump. Ce remaniement inattendu intervient alors que Washington tente d'intégrer ses alliés kurdes syriens, les Forces démocratiques syriennes (FDS), à l'administration centrale de Damas dirigée par Ahmed al-Chareh, un leader islamiste qui a pris le pouvoir à la faveur d'une offensive fulgurante à la fin de l'année dernière.
Une source diplomatique américaine a minimisé l'ampleur de ces départs, expliquant à Reuters qu'une « poignée » d'employés de la SRP avaient été informés de la fin de leur mission dans le cadre d'une simple réorganisation interne. Elle a insisté sur le fait que ces changements n'auraient « aucun impact sur la politique américaine en Syrie » et n'étaient pas motivés par des divergences politiques avec Tom Barrack ou la Maison Blanche.
Le jeu trouble des États-Unis en Syrie
Pourtant, un diplomate occidental a évoqué des tensions sous-jacentes : ces limogeages seraient en partie dus à des divergences de vues entre le personnel et Tom Barrack sur la question des FDS et d'Ahmed al-Chareh. Sans entrer dans les détails, il a souligné que les FDS, soutenues militairement par les États-Unis pour leur rôle clé dans la lutte contre l'État islamique sous Bachar el-Assad, résistent à une intégration forcée.
En mars dernier, un accord avait été conclu pour rattacher leurs zones d'influence à l'autorité centrale syrienne et les intégrer aux forces de sécurité nationales. Mais les FDS, engagées dans des affrontements sporadiques avec les troupes syriennes et les forces turques, plaident pour un modèle fédéral plus décentralisé afin de préserver l'autonomie conquise au fil de la guerre civile.
De son côté, un responsable du département d'État a adopté une ligne prudente, déclarant qu'il ne commentait pas « les décisions relatives au personnel ou les réorganisations administratives ». Il a toutefois ajouté que « le personnel clé travaillant sur les questions relatives à la Syrie continue d'opérer de plusieurs endroits », suggérant une continuité opérationnelle.
Les raisons officielles de ces évictions n'ont pas été confirmées, mais leur caractère soudain et involontaire a surpris les observateurs, alimentant les spéculations sur des frictions internes au sein de l'administration Trump. Ce coup de théâtre diplomatique soulève des interrogations sur l'avenir de la stratégie américaine en Syrie. Alors que les États-Unis maintiennent environ 900 soldats dans le nord-est pour contrer les reliquats de Daesh et sécuriser les champs pétrolifères, l'intégration des FDS sous l'égide d'al-Chareh pourrait fragiliser les alliances kurdes et raviver les tensions avec la Turquie, qui les considère comme une extension du PKK.