Le président syrien Ahmed al-Chareh a surpris en appelant à des « relations d’État à État » avec le Liban, affirmant avoir fait des concessions sur les préjudices causés par le Hezbollah, lors d’un discours de 20 minutes devant la presse arabe.
Cette ouverture, inattendue après des mois de méfiance depuis son accession au pouvoir en décembre 2024, contraste avec l’hostilité affichée envers l’Iran et ses alliés, notamment le Hezbollah, affaibli par la mort de Hassan Nasrallah et la coupure de ses lignes d’approvisionnement.
Al-Chareh, mettant en avant l’identité omeyyade syrienne, a rejeté les accusations de menace existentielle tout en suggérant que des régions sunnites et chrétiennes libanaises auraient accueilli une intervention syrienne contre le parti chiite, bien qu’il ait écarté cette option pour privilégier la stabilité.
Un virage diplomatique calculé
Cette posture s’explique par des impératifs diplomatiques urgents. Face aux tendances autonomistes en Syrie et à la prise de Rakhlé par Israël en août 2025, al-Chareh cherche à accumuler un soutien international, notamment des États-Unis et des pays arabes, en se posant comme stabilisateur régional, à l’image de Hafez el-Assad dans les années 1970.
Il a pris ses distances avec les Frères musulmans et les printemps arabes, tout en avançant vers un accord sécuritaire avec Israël et une fermeture de l’accès iranien au Proche-Orient, nécessitant une coopération avec Beyrouth. La visite récente de Tom Barrack a renforcé cette dynamique, avec Damas prêt à négocier la frontière et à proposer un « deal gagnant-gagnant » économique, liant la résolution de dossiers (détenus syriens, frontière) à un accès privilégié à la reconstruction syrienne.
Le Hezbollah, encerclé par Israël et une Syrie potentiellement hostile, perçoit cette évolution comme une menace, amplifiant ses discours sur la nécessité de ses armes. Pourtant, al-Chareh se veut rassurant, rejetant toute intention revancharde et insistant sur un retour à la stabilité.
L'Arabie saoudite médiatrice
Le vice-Premier ministre libanais Tarek Mitri confirme une amélioration des relations, malgré une méfiance initiale, avec une délégation syrienne attendue la semaine prochaine pour discuter de coopération économique et sécuritaire.
L’Arabie saoudite, garante de ce rapprochement, voit dans cette dynamique une chance de contrer l’Iran, tandis que Damas pourrait chercher à bâtir un soft power dans un Liban fragilisé, utilisant l’économie comme levier.
Cependant, des tensions subsistent, notamment avec les craintes d’actions du Hezbollah ou de loyalistes de l’ancien gouvernement, retardant la visite du ministre syrien Assaad el-Chibani.