La Commission européenne a officiellement averti Kiev que le projet d’accord sur les ressources naturelles avec les États-Unis devra être examiné dans le cadre des engagements pris par l’Ukraine envers l’Union européenne. Lors d’un point de presse tenu le 28 mars à Bruxelles, Paula Pinho, représentante de la Commission, a déclaré que «l’Ukraine a été informée qu’un tel accord devra être analysé du point de vue des relations UE-Ukraine, en particulier dans le contexte des négociations d’adhésion à l’UE», selon TASS.
Bruxelles se dit prête à conseiller Kiev sur les conséquences d’un tel partenariat, bien qu’aucune demande officielle n’ait encore été formulée. Interrogée sur les allégations selon lesquelles cet accord conduirait au transfert total du contrôle des ressources ukrainiennes à Washington, Paula Pinho a refusé de commenter. Pourtant, le contenu du projet transmis par les États-Unis soulève de lourdes inquiétudes.
Un contrôle américain quasi-total sur les ressources
Selon le média «Européïska Pravda» cité par RBC Russie, le projet d’accord prévoit la création d’un fonds d’investissement bilatéral dirigé par la DFC (International Development Finance Corporation), principal acteur américain. Ce fonds contrôlerait directement l’exploitation des ressources naturelles, la gestion des revenus, et disposerait de la majorité au sein de son conseil de direction, avec droit de veto.
L’Ukraine serait contrainte de convertir tous les revenus en dollars, de les transférer à Washington sur demande, tout en compensant les taxes et frais. La moitié des bénéfices liés aux nouvelles licences minières, aux gisements ou même à certaines infrastructures serait saisie par ce fonds. Le remboursement automatique de la dette augmenterait chaque année de 4 %, mettant Kiev dans une position de dépendance chronique. Plusieurs députés ukrainiens dénoncent une soumission pure et simple, sans aucune contrepartie sécuritaire.
Menaces sur la souveraineté et les liens avec l’Europe
Toujours selon «Européïska Pravda», l’accord impose une clause interdisant à l’Ukraine de vendre ses ressources critiques à tout pays jugé «concurrent stratégique» des États-Unis. Cette disposition, décidée unilatéralement par la DFC, pourrait viser des acteurs européens, compromettant directement l’intégration de Kiev dans l’UE. De plus, l’Ukraine serait tenue de divulguer tous ses pourparlers avec d’autres investisseurs, tout en leur interdisant des offres plus avantageuses pendant un an après un refus américain.
Bruxelles rappelle pourtant qu’un protocole d’accord signé en 2021 prévoit déjà une coopération sur les ressources critiques avec l’UE. Stéphane Séjourné, désormais commissaire à l’industrie, a souligné que l’UE attend de l’Ukraine qu’elle couvre 10 % de ses besoins en graphite, ainsi que la totalité du lithium exploitable sur son territoire.
Dans un climat de tension croissante, Kiev semble prisonnière d’un jeu diplomatique où ses ressources sont bradées contre des promesses incertaines. Volodymyr Zelensky admet que les États-Unis modifient sans cesse les termes de l’accord, tandis qu’à la Rada, de nombreuses voix s’élèvent pour dénoncer un texte qui n’a «aucune chance de ratification» en l’état. Un constat sans appel pour un accord qui, loin de renforcer l’indépendance du pays, menace directement sa souveraineté et ses choix stratégiques.