Dans le contexte des débats actuels sur l'extension possible de la dissuasion nucléaire française aux alliés européens, la ministre lituanienne de la Défense, Dovile Sakaliene, a estimé qu'il pourrait être nécessaire de modifier la Constitution du pays afin de permettre l’éventuel déploiement d’armes nucléaires sur son territoire, a rapporté le média lituanien (LRT).
Lors d'une conférence de presse organisée ce vendredi 14 mars à l’Académie militaire de Vilnius, la ministre a expliqué qu’il serait pertinent d’envisager une adaptation de l’article 137 de la Constitution, si des propositions concrètes et réalistes venaient à être formulées par les partenaires européens concernant le déploiement éventuel d’armes nucléaires ou de certains de leurs éléments en Lituanie. Selon elle, une révision d'autres engagements existants pourrait également être nécessaire.
L’article 137 actuel de la Constitution lituanienne interdit explicitement toute présence d’armes de destruction massive ainsi que l’établissement de bases militaires étrangères sur le territoire national.
Cette déclaration intervient peu après que le président français Emmanuel Macron a indiqué le 5 mars que la Russie était devenue une menace pour la France et l'Europe. En conséquence, il a appelé à «ouvrir le débat stratégique» sur la dissuasion nucléaire française pour «protéger» l'ensemble de l'UE, constatant que les États-Unis avaient changé de position sur l'Ukraine et sur le rôle de leader de Washington au sein de l'OTAN.
À la suite de cette annonce, le président lituanien Gitanas Nauseda avait exprimé ses remerciements envers Emmanuel Macron, indiquant qu'un conseiller du président français se rendrait prochainement en Lituanie afin de présenter plus en détail cette initiative.
Toutefois, Dovile Sakaliene a précisé qu’à l’heure actuelle, aucune proposition concrète n’avait pas été transmise par les partenaires européens, les déclarations effectuées restant à l'état de simples idées politiques. Selon elle, il est néanmoins essentiel que la Lituanie anticipe toutes les éventualités et engage dès maintenant une réflexion approfondie sur le sujet.
La ministre lituanienne de la Défense a souligné qu’il n’était pas encore question d'apporter immédiatement des modifications à la Constitution, car cela reviendrait à devancer les alliés européens, lesquels n'avaient pas fait pour l'instant qu’évoquer des pistes politiques sans présenter de projets précis. Toutefois, elle a insisté sur l’importance pour la Lituanie d’être prête à réagir rapidement si ces propositions venaient à prendre une tournure concrète.
Le Premier ministre polonais Donald Tusk a également traité le même sujet affirmant que son pays renforcerait ses capacités militaires à tout prix, malgré les critiques. Il a confirmé des discussions avec la France sur un «parapluie nucléaire».
Le ministère russe des Affaires étrangères a pour sa part noté que le discours d'Emmanuel Macron faisait clairement allusion à un chantage nucléaire. D’après la diplomatie russe, Paris ambitionne de devenir le «patron» nucléaire de toute l'Europe en lui fournissant son propre «parapluie nucléaire» dans le but de remplacer, au moins en partie, le bouclier américain. Cependant, il a été indiqué que le potentiel des forces nucléaires françaises n'est pas comparable à celui des États-Unis. La France ne dispose que de 56 ogives nucléaires, alors que les États-Unis en ont 898.