Le Groenland, territoire autonome sous souveraineté danoise, compte environ 57 000 habitants. Son parlement, l’Inatsisartut, est composé de 31 sièges, renouvelés tous les quatre ans. L’élection de cette année prend une importance particulière en raison des ambitions indépendantistes de plusieurs partis politiques et des interventions du président américain Donald Trump.
Depuis son arrivée au pouvoir en janvier, Trump a exprimé son désir de faire du Groenland une possession américaine, affirmant que l’île était essentielle à la sécurité et aux intérêts économiques des États-Unis. Lors d’un discours au Congrès, il a déclaré : «Je pense que nous allons obtenir le Groenland d’une manière ou d’une autre», suscitant l’indignation des responsables groenlandais. Le Premier ministre Mute Egede a immédiatement réagi : «Nous ne sommes pas à vendre et ne pouvons pas simplement être pris. Nous sommes Kalaallit».
D’après Reuters, tous les partis représentés au Parlement groenlandais s’opposent à une annexion par les États-Unis. En revanche, ils divergent sur la manière et le calendrier pour atteindre l’indépendance. Les formations majeures, Inuit Ataqatigiit (IA) et Siumut, veulent une transition progressive, tandis que le parti Naleraq prône une rupture rapide avec le Danemark et souhaite conclure un accord de défense avec les États-Unis.
Une dépendance économique freinant l’indépendance
Malgré le fort désir d’autonomie, le Groenland reste financièrement dépendant du Danemark, qui lui verse une subvention annuelle d’environ 530 millions d’euros, soit 20% du PIB de l’île. En outre, l’État danois gère toujours la politique étrangère, la défense et la monnaie du territoire.
Les partisans d’une indépendance immédiate estiment que l’exploitation des ressources naturelles de l’île – notamment les terres rares et les hydrocarbures – pourrait compenser cette dépendance. Cependant, comme l’indique AP, ces industries sont encore à un stade peu avancé, freinées par des défis environnementaux et la domination chinoise sur le marché des métaux stratégiques.
Dans un sondage de janvier 2025 cité par CNBC, 56% des Groenlandais voteraient en faveur de l’indépendance si un référendum avait lieu aujourd’hui, mais nombreux sont ceux qui craignent une baisse du niveau de vie après une éventuelle séparation du Danemark. Un habitant de Nuuk interrogé par France24 résume cette contradiction : «Bien sûr, nous voulons être indépendants, mais économiquement, nous ne sommes pas prêts».
Des tensions internationales autour du Groenland
Le Groenland, en raison de sa position stratégique et de ses ressources naturelles, est devenu un enjeu géopolitique majeur. Outre les États-Unis, beaucoup de pays manifestent un intérêt croissant pour l’Arctique. Les autorités danoises ont confirmé que leurs services de renseignement surveillent activement les tentatives d’ingérence étrangère dans l’élection, rapporte CNN.
Donald Trump, malgré le refus catégorique du Groenland de rejoindre les États-Unis, continue de proposer des investissements massifs pour attirer le territoire sous l’influence américaine. Il a promis sur son réseau Truth Social : «Nous sommes prêts à investir des milliards de dollars pour créer des emplois et vous rendre riches».
Dans ce contexte, le Premier ministre Mute Egede et son parti Inuit Ataqatigiit militent pour une approche prudente, misant sur une autonomie progressive sans rompre brutalement avec le Danemark. Mais d’autres forces politiques, comme le Naleraq, veulent accélérer le processus et voir le Groenland prendre son destin en main dès le prochain mandat.
Une élection incertaine
Alors que les bureaux de vote fermeront ce soir, les résultats définitifs seront connus tôt mercredi matin. Faute de sondages fiables, l’issue du scrutin reste incertaine, mais une chose est sûre : quelle que soit la composition du prochain Parlement, la question de l’indépendance ne fera que gagner en intensité. L’issue de ce vote pourrait influencer les négociations futures entre Nuuk et Copenhague, voire redéfinir les relations entre le Groenland et le Danemark et les États-Unis.