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Votes à l’ONU sur l’Ukraine : tensions, amendements et revirements

L'Assemblée générale de l’ONU a voté deux résolutions sur l’Ukraine, l’une portée par Kiev et l’autre par les États-Unis. Des désaccords ont éclaté sur les amendements proposés, certains pays européens durcissant le ton contre la Russie, tandis que Moscou cherchait à souligner les causes profondes du conflit.

Le 24 février, à l'occasion du troisième anniversaire du début de l’opération militaire spéciale en Ukraine, l'Assemblée générale des Nations unies a voté les résolutions présentées par l'Ukraine et les États-Unis. Après des amendements au projet américain apportés par les pays européens, les délégués de l'ONU ont approuvé les deux documents par 93 voix chacun.

La résolution portée par l’Ukraine et plusieurs pays européens

Un groupe de 53 pays, incluant l’Ukraine, a soumis un projet de résolution intitulé «Soutien à la réalisation d'une paix globale, juste et durable en Ukraine». Sans surprise, ce texte met en avant la position pro-ukrainienne sur le respect de la souveraineté et de l’intégrité territoriale des États membres de l’ONU, condamnant les actions de la Fédération de Russie. 93 pays se sont prononcés en faveur de la résolution, 18 contre et 65 se sont abstenus.

Le projet de résolution des États-Unis

Les États-Unis ont proposé leur propre texte, plus court et intitulé «Le chemin vers la paix». Cette résolution, composée de trois paragraphes, exprime le regret des pertes humaines causées par le conflit en Ukraine et rappelle le rôle fondamental de l’ONU dans la préservation de la paix et la résolution pacifique des différends. Elle appelle à un arrêt immédiat des hostilités et à la mise en place d’une paix durable entre les parties concernées. Vassili Nebenzia, représentant permanent de la Fédération de Russie auprès de l’ONU, a soutenu ce projet américain: «Ce texte est certainement un pas dans la bonne direction».

Deux jours avant le scrutin, le secrétaire d’État américain, Marco Rubio, avait encouragé les pays membres à soutenir ce projet, soulignant qu'il pourrait constituer un premier pas vers un règlement pacifique.

Parmi les co-auteurs de cette résolution figurent l'Albanie, l'Argentine, la Hongrie, la Géorgie, Israël et la Macédoine du Nord. Selon des responsables hongrois et géorgiens, leur soutien à cette résolution s’explique par la nécessité d’avancer vers une solution diplomatique.

Le vote et les amendements proposés

Avant le vote, plusieurs modifications ont été suggérées. La Russie a proposé d’ajouter à l’appel à l’arrêt du conflit une mention sur la nécessité de traiter ses causes profondes. En parallèle, un groupe de 24 pays européens a présenté trois amendements visant à reformuler certains passages du texte américain pour y ajouter des formulations antirusses.

Les amendements européens ont été adoptés avec des majorités variées, tandis que la proposition russe a été rejetée. Les États-Unis, ayant voté contre toutes les modifications, ont finalement décidé de s’abstenir lors du vote final. Ainsi, 93 pays ont soutenu la résolution amendée, huit s’y sont opposés et 73 se sont abstenus.

Comment s'est déroulé le vote au Conseil de sécurité

En parallèle de l’Assemblée générale, les États-Unis ont tenté de soumettre leur projet au Conseil de sécurité. Cette initiative aurait pu influencer le débat général sur la nécessité d'une résolution distincte de l’Assemblée. Cependant, en raison de désaccords entre les membres du Conseil, le texte a finalement été examiné après le vote de l’Assemblée générale.

Lors de la session du Conseil de sécurité, plusieurs amendements similaires à ceux proposés à l’Assemblée générale ont été discutés. La Russie a également suggéré des modifications dans la terminologie employée. Ces propositions n'ont pas été retenues, et la résolution américaine a été adoptée dans sa version originale avec dix voix pour, cinq abstentions et aucune opposition formelle.

Après le vote, la représentante américaine à l’ONU, Dorothy Shea, a déclaré que cette résolution représentait une avancée significative vers un règlement pacifique et un message fort en faveur de la stabilité internationale.

Les contradictions occidentales mises en lumière par le MAE russe

Maria Zakharova, porte-parole du ministère russe des Affaires étrangères, n’a pas manqué de réagir à ces derniers développements. Dans une déclaration incisive, elle a souligné ce qu’elle considère comme une incohérence manifeste de la diplomatie française et britannique. Selon elle, leur approche est plus opportuniste que fondée sur des principes clairs: «Je vous rappelle que la France et la Grande-Bretagne disposent du droit de veto au Conseil de sécurité et auraient pu ne pas entériner la résolution. Mais elles ne l’ont pas fait. Ainsi, la résolution du Conseil de sécurité des Nations unies, ne contenant pas de condamnation de la Russie, mais contenant un appel à la paix, définit un cadre correct et, du point de vue de son statut, prime sur la résolution de l’Assemblée générale des Nations unies».

D’après Zakharova, cette décision contraste fortement avec l’attitude adoptée par ces mêmes pays lors du vote à l’Assemblée générale. En effet, là où ils avaient soutenu les amendements européens visant à durcir la position à l’égard de la Russie, ils ont finalement validé, sans aucune modification, la version originale du texte américain au Conseil de sécurité : «Question : à quel moment la France et la Grande-Bretagne ont-elles fait preuve de sincérité ? Lorsqu’elles gâchaient le projet de résolution américain de l’Assemblée générale des Nations unies ou lorsqu’elles approuvaient ce même projet américain sans amendements ?».

La porte-parole de la diplomatie russe a également ajouté : « La salle de l’Assemblée générale est à trois minutes à pied de celle du Conseil de sécurité. Ont-elles changé de point de vue sur la crise mondiale en 180 secondes ? Ou ont-elles un masque dans chaque poche, un pour chaque occasion ?».