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Attaque contre le Hezbollah : la piste du piégeage des bipeurs largement privilégiée

Dans une attaque coordonnée au Liban, des milliers de membres du Hezbollah ont été blessés et au moins 12 sont décédés lors d'explosions simultanées de leurs bipeurs, un système de radiomessagerie. La piste du piégeage, en amont, des appareils achetés par le Hezbollah fait consensus chez les analystes militaires et experts en cybersécurité.

L'explosion simultanée le 17 septembre à travers le Liban des bipeurs utilisés par le mouvement du Hezbollah a fait au moins 12 morts et plus de 2 800 blessés, selon les autorités sanitaires libanaises.

Après vérification auprès de tous les hôpitaux, le bilan s’élève à «12 morts, dont deux enfants», et on dénombre «entre 2 750 et 2 800 blessés», a signalé le ministre libanais de la Santé, Firass Abiad, lors d'une conférence de presse. Certaines des personnes blessées dans la région de la Békaa, à l'est du Liban, ont été transférées en Syrie, tandis que d'autres seront évacuées vers l'Iran.

La Russie a condamné ce 18 septembre cette attaque coordonnée à travers le Liban et a appelé toutes les parties à «la retenue», afin de ne pas «déstabiliser davantage» la région. «Nous condamnons fermement l'attaque sans précédent contre le Liban ami et ses citoyens, qui constitue une violation flagrante de sa souveraineté», a indiqué par voie de communiqué la porte-parole de la diplomatie russe, Maria Zakharova, fustigeant un «acte de guerre hybride».

Cet événement sans précédent, véritable coup dur pour le Hezbollah, a suscité de nombreux débats dans la presse régionale et internationale. Les analystes militaires se sont penchés sur la question, nombre d'entre eux s'accordant sur un piégeage préalable des appareils.

Appareillage compromis 

Le lanceur d’alerte Edward Snowden a suggéré qu'il y a eu «trop de blessures constantes et très graves» et pas assez «d'incendies et de ratés» pour soutenir l'hypothèse que l'incident soit causé par des batteries surchauffées qui explosent. 

Du même avis, Imad Hajj, ingénieur informatique à l’Université américaine de Beyrouth, a mis en avant l'hypothèse de bipeurs transformés en bombes portatives. «En me basant uniquement sur les éléments connus, il me semble peu probable que de tels appareils puissent avoir été transformés en bombes à distance sans modification préalable, même en tenant compte des risques d’embrasement des batteries au lithium», a-t-il estimé.

L’hypothèse du sabotage des bipeurs a également été évoquée par l’expert militaire et vétéran de guerre Elijah Magnier, qui a présenté plusieurs scénarios dans un message sur la plateforme X (ex-Twitter). Les agents israéliens, selon ses dires, ont sans doute «infiltré le processus de production et ajouté dans les bipeurs un composant explosif et un détonateur activable à distance, sans éveiller les soupçons.»

Même tonalité du côté du chercheur et consultant indépendant en cybersécurité, Lukasz Olejnik, qui confirme l’hypothèse d’un piratage des appareils et estime «fort probable que les explosifs aient été placés à l'avance». «Le facteur clé réside dans les acquisitions récentes, qui suggèrent un possible problème de chaîne d'approvisionnement ou une falsification», a-t-il déclaré dans un message posté sur X.

Une piste qu’a corroborée le New York Times (NYT). Citant «des responsables américains et autres informés de l’opération», le quotidien affirme qu’Israël serait parvenu à trafiquer les bipeurs achetés par le Hezbollah à Taïwan en implantant une infime quantité d’explosif à côté de la batterie des appareils.

«Des experts indépendants en cybersécurité qui ont étudié les images des attaques ont déclaré qu’il était clair que la force et la vitesse des explosions avaient été causées par un type de matériau explosif», a notamment rapporté le NYT dans un article publié quelques heures après ces explosions en série.

«Ces téléavertisseurs ont probablement été modifiés d’une manière ou d’une autre pour provoquer ce type d’explosions – la taille et la force de l’explosion indiquent qu’il ne s’agissait pas seulement de la batterie», a déclaré au quotidien américain Mikko Hypponen, spécialiste de la recherche pour la société de logiciels WithSecure et conseiller en cybercriminalité auprès d’Europol.

Le chef de la diplomatie américaine, Antony Blinken, a nié ce 18 septembre que les États-Unis auraient pu être impliqués ou préalablement au courant de ces explosions.

Le Hezbollah promet de riposter 

Dans un communiqué publié plus tôt dans la journée de ce 18 septembre sur Telegram, le Hezbollah a promis de poursuivre ses opérations de soutien au Hamas palestinien et de punir Israël. Le groupe avait affirmé peu de temps après l'explosion qu’Israël était «entièrement responsable», assurant que l'État hébreu recevrait «son juste châtiment» à la suite de «cette agression criminelle».

Pour sa part, l'Iran a également accusé Israël de «tuerie de masse». Nasser Kanani, porte-parole du ministère des Affaires étrangères, a «fermement condamné comme une tuerie de masse l'acte terroriste du régime sioniste au Liban, visant les citoyens libanais», d'après le communiqué de la diplomatie iranienne.

Toujours ce 18 septembre, le chef de la diplomatie européenne Josep Borrell a condamné des «attaques qui mettent en danger la sécurité et la stabilité du Liban, et augmentent le risque d'escalade dans la région».

La veille, la coordinatrice spéciale des Nations unies pour le Liban avait estimé que cet événement marquait une «escalade extrêmement inquiétante».

De son côté, Israël n'a pas commenté ces explosions, survenues dans plusieurs places fortes du Hezbollah quelques heures après l'annonce par ce pays qu'il étendait les objectifs de la guerre contre le Hamas dans la bande de Gaza à sa frontière nord avec le Liban.