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Sahara occidental : l'Atlantic Council redoute que la décision de Macron n’exacerbe les tensions au Maghreb

L'Altantic Council estime que l'alignement de Paris sur le narratif marocain sur le dossier sahraoui risque d'exacerber les antagonismes au Maghreb, rappelant notamment les liens entre Alger et Moscou ainsi que l'Iran. Depuis plusieurs années, l'Algérie renforce ses partenariats avec l'Iran, la Russie et la Chine.

Alors que la France s'est alignée sur le plan d'autonomie du Maroc pour régler la question du Sahara occidental, l'Algérie pourrait-elle, en contrepartie, renforcer ses relations avec Moscou, Téhéran et Pékin ?

C'est en tout cas l'une des pistes envisagées par l'Atlantic Council, dans une publication en date du 1er août. En effet, en rompant le 30 juillet dernier avec sa position de neutralité à l'égard du contentieux sur le dossier sahraoui, la France a brisé un statu quo entretenu depuis des décennies par les Européens.

«Ce dernier, ainsi que le recours exclusif à la mission de maintien de la paix des Nations unies pour maintenir le statu quo entre Rabat et Alger, ont été essentiels à la stabilisation de la région», selon ce think tank washingtonien spécialisé dans les relations internationales.

En embrassant la cause du Maroc, pays «aligné avec les États-Unis et la France sur une vision commune de l’avenir», la décision de Paris risque de mécaniquement pousser «le régime algérien» à renforcer ses liens avec ses partenaires russes et iraniens. 

«La décision d’Emmanuel Macron a mis à mal un président algérien déjà nerveux, Abdelmadjid Tebboune, candidat à sa réélection le 7 septembre. Les événements de cette semaine pourraient le pousser encore plus loin dans les bras de l’Iran et de la Russie», ajoute encore l'Atlantic Council.

En 2018, le Maroc avait rompu ses relations avec l'Iran, l'accusant d'armer le Front Polisario via le Hezbollah libanais. Alger et Téhéran partagent la même position politique à l'égard du conflit à Gaza, mais également sur le dossier syrien.

Une tendance déjà lourde

En mars dernier, lors d'un déplacement du défunt président iranien Ebrahim Raïssi à Alger, les deux pays avaient signé un mémorandum d'entente sur la coopération dans le domaine du pétrole et du gaz mais également dans le domaine des sciences et des technologies. 

L'Atlantic Council poursuit en affirmant qu'«avec les rumeurs croissantes sur la présence de groupes iraniens et wagnériens parmi les Sahraouis dans les camps de Tindouf, dans l’ouest de l’Algérie, où vivent environ 173 600 réfugiés, il devient impératif pour les États-Unis et les pays européens d’essayer de résoudre le dossier du Sahara une fois pour toutes».

Indépendamment de ces allégations, la Russie et l'Algérie n'ont de cesse de renforcer leurs relations bilatérales. Dans le sillage de la crise du blé, liée au conflit en Ukraine, Alger et Moscou avaient signé en 2023 un accord de coopération dans le domaine de l'agriculture. La même année, lors de son déplacement dans la capitale russe, le président algérien et son homologue russe avaient acté le renforcement du partenariat stratégique entre leurs deux pays, via la signature de plusieurs accords.

En 2021, l'Algérie avait conclu un accord pour l'achat de 7,5 milliards de dollars d'armements. Un contrat qui avait fait grincer des dents en Occident. Des membres du Congrès des États-Unis avaient notamment appelé Washington à sanctionner Alger. 

Outre l'Iran et la Russie, l'Algérie continue de diversifier ses relations avec Pékin. D'ailleurs, d’après le site Algérie Éco, depuis plus d’une décennie, la Chine a gagné de grandes parts du marché national dans tous les domaines. Cette puissance asiatique a réalisé des projets de grande envergure dans le plus grand pays d’Afrique. Les échanges commerciaux entre les deux pays ont atteint 9,2 milliards d’euros en 2023, a rapporté le média algérien.

Lors du déplacement d'Abdelmadjid Tebboune en juillet 2023 dans la capitale chinoise, les deux pays avaient notamment signé 19 accords dans divers secteurs tels que le transport ferroviaire, le transfert de technologie, la coopération agricole et les communications, ainsi que le sport, l'investissement et la coopération commerciale.

Ainsi, la décision d'Emmanuel Macron de s'aligner sur le narratif marocain, concernant le dossier sahraoui, risque d'accentuer une tendance qui était déjà bien visible, à savoir le rapprochement d'Alger avec l'axe Téhéran-Pékin-Moscou.