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Conflit en Ukraine : l’échange de prisonniers entre Washington et Moscou inquiète à Kiev

Plusieurs responsables ukrainiens, cités le 2 août par le Washington Post, ont fait part de leur inquiétude, voire de leur méfiance, vis-à-vis des États-Unis après l’échange de prisonniers négocié avec la Russie, redoutant que leur principal soutien militaire n’entreprenne sans leur accord des négociations sur la résolution du conflit.

«L'ampleur, la complexité et l'importance de cet échange ne sont pas passées inaperçues» en Ukraine, a rapporté le 2 août le Washington Post. Bien que le porte-parole du Kremlin ait souligné auprès de la presse que l’Ukraine et l’échange de prisonniers qui a eu lieu le 1er août entre les États-Unis et la Russie soient «des domaines de travail différents», Kiev a jugé bon de faire part de ses impressions à son soutien américain.

«Les responsables ukrainiens ont insisté le 2 août sur le fait qu’ils exigeraient du président Biden qu’il tienne sa promesse maintes fois répétée : "Rien sur l’Ukraine, sans l’Ukraine"», a ainsi relaté le quotidien américain, rappelant l’extrême dépendance de Kiev vis-à-vis de ses soutiens occidentaux dans le conflit qui l’oppose à la Russie.

Mykhailo Podolyak, conseiller de Volodymyr Zelensky,fait valoir auprès du Post que l’Ukraine serait dorénavant «trop indépendante» pour être mise à l’écart de négociations sur un cessez-le-feu. «Il est impossible de parvenir à un accord avec la Russie sur une question concernant l’Ukraine sans l’Ukraine», a-t-il insisté, affirmant que «le prix de la guerre est trop élevé» et que «l’influence de l’Ukraine en matière d’information est trop grande» et que par conséquent «une fin injustifiée de la guerre entraînerait une tragédie, et pas seulement pour l’Ukraine».

Concernant les déclarations de Peskov, le Washington Post précise que «Kiev craint depuis longtemps que ses partisans, en particulier les États-Unis, n’entament des négociations secrètes avec Moscou». Un tel accord, ayant nécessité des mois de négociations, aurait même laissé des Ukrainiens «méfiants» selon le média américain. «Certains craignent que cela ne devienne une tendance», a déclaré au Washington Post le maire de Kiev, Vitaly Klitchko, celui-ci ajoutant que tout accord conclu «devrait être une position commune avec l'Ukraine».

Zelensky admet ne pas pouvoir empêcher la Russie d'être à un prochain sommet sur la paix

Des confessions à la presse américaines qui surviennent à l’heure où le ton semble changer à Kiev vis-à-vis de potentielles négociations avec la Russie. Jusqu’à récemment intransigeant quant au fait qu’aucune négociation ne devait être entreprise avec une Russie dirigée par Vladimir Poutine, le 31 juillet Volodymyr Zelensky a concédé à la presse française que la «majorité du monde» estimait que Moscou devait être représenté à un prochain sommet pour la paix, ajoutant ne pas être en mesure de s’y opposer.

Les déclarations de Kiev ont été accueillies avec scepticisme du côté de Moscou. La Russie est ouverte aux négociations avec l'Ukraine, a ainsi indiqué le porte-parole du Kremlin Dmitri Peskov le 25 juillet, soulignant néanmoins les incertitudes entourant la position ukrainienne : «des déclarations très différentes ont été faites, ce n'est pas tout à fait clair encore».

Dans un discours de politique étrangère prononcé le 14 juin, le président russe avait indiqué que des négociations avec l’Ukraine pourraient être entamées dès lors que celle-ci retirerait ses troupes des Républiques populaires de Donetsk et de Lougansk et des régions de Kherson et de Zaporojié, et accepterait d’opter pour un «statut neutre – non aligné, non nucléaire», évoquant aussi une «démilitarisation», une «dénazification» et une levée des sanctions contre la Russie.

Pour ailleurs, Volodymyr Zelensky continue de se rattacher à sa «formule de paix». Kiev exige encore le retour aux frontières de 1991, en dépit notamment du rattachement de la Crimée à la Fédération de Russie par référendum en 2014 après le coup d’État de Maïdan. Des revendications jugées irréalistes par Moscou.