Une «menace voilée», selon Bloomberg : l’agence, citant des personnes proches du dossier, a rapporté le 9 juillet dernier que Riyad avait fait part aux membres du G7, «plus tôt cette année», qu’elle pourrait vendre des titres de créance européens si ces derniers venaient à saisir les actifs gelés de la Russie. «Les Saoudiens ont notamment fait référence à la dette émise par le Trésor français», ont notamment indiqué deux sources à l’agence.
Le G7 a finalement acté en mai dernier la saisie des profits de ces actifs afin d'armer Kiev, et non des actifs eux-mêmes. Londres et Washington, à l’origine partisans de la mesure la plus radicale, se sont finalement rangés derrière les Européens, plus inquiets des répercussions internationales d’une saisie, arbitraire et susceptible d’effrayer les investisseurs internationaux.
En juin, les pays du G7 envisageaient un prêt de 50 milliards de dollars d'ici fin 2024 à Kiev, garanti par les futurs intérêts générés par les actifs russes.
Quelque 191 milliards d’euros de la Banque de Russie sont actuellement placés auprès d’Euroclear Bank (EB), un organisme international de dépôts de fonds siégeant à Bruxelles. Selon la patronne d’EB, Valérie Urbain, ces fonds ont généré 4,4 milliards d’euros (avant imposition) de revenus en 2023. Environ 5 milliards de dollars d’actifs de la Banque de Russie ont aussi été identifiés aux États-Unis.
Moscou a fustigé une expropriation
Le 22 mai, le porte-parole de la présidence russe, Dmitri Peskov, avait fustigé une «expropriation» : «[Les Européens] comprennent le danger pour eux des conséquences potentielles, ils ont donc opté pour une version allégée, mais la version réduite n'est rien d'autre qu'une expropriation.»
La position de l'Arabie saoudite a probablement influencé la réticence de ces pays
«La position de l'Arabie saoudite a probablement influencé la réticence de ces pays», rapporte Bloomberg, avant de préciser que le ministère des Finances saoudien a nié avoir proféré la moindre menace de ce type. «Nos relations avec le G7 et d’autres pays sont fondées sur le respect mutuel et nous continuons à discuter de toutes les questions qui favorisent la croissance mondiale et renforcent la résilience du système financier international», a fait valoir ce dernier.
Un responsable saoudien cité par Bloomberg a estimé que «ce n'était pas le style du gouvernement de proférer de telles menaces, mais qu'il avait probablement exposé aux membres du G7 les conséquences d'éventuelles saisies».
Plusieurs sources de l’agence n’ont pas été en mesure de déterminer si l’Arabie saoudite avait agi «par intérêt personnel, craignant qu’une saisie ne crée un précédent qui pourrait être utilisé contre d’autres pays à l’avenir» ou «par solidarité avec la Russie».
L’affaire confirme néanmoins le poids grandissant, financièrement et diplomatiquement, de Riyad sur la scène internationale. L’Arabie saoudite peut se targuer d’un statut neutre face au conflit ukrainien, ayant conservé des liens avec Kiev et Moscou.