Le meurtre de Pascal Sleiman, responsable du caza de Jbeil au sein des Forces libanaises, a engendré de vive tensions au sein de la société du pays du Cèdre. Alors que la force d'opposition chrétienne soupçonne le Hezbollah d'être le commanditaire de cet assassinat, le parti chiite accuse le parti de Samir Geagea de mener le pays vers une guerre civile.
Tout a commencé le 7 avril, lorsqu'une altercation sur la route de Jbeil, au nord de Beyrouth, a entraîné l'enlèvement de Pascal Sleiman par une bande de Syriens, a rapporté L'Orient-Le Jour. Suite à la disparition du responsable politique des Forces libanaises de la région, ses partisans ont commencé à bloquer les routes et à s'en prendre aux réfugiés syriens dans plusieurs localités. Samir Geagea a même fait le déplacement, et ce, alors qu'il quitte très rarement son fief de Meerab pour des raisons sécuritaires.
L'armée libanaise a dès le 8 avril mis fin au suspense en déclarant dans un message publié sur X (ex-Twitter) que la Direction des renseignements de l'armée avait arrêté «la plupart des membres de gangs syriens impliqués dans l'enlèvement», en précisant que «la personne kidnappée avait été tuée par eux alors qu'ils tentaient de voler sa voiture dans la région de Jbeil et qu'ils avaient transporté son corps en Syrie». L'armée libanaise s'est coordonnée avec les autorités syriennes pour retrouver le corps du défunt.
Un «meurtre prémédité» ?
Peu de temps après l'annonce de la mort de Pascal Sleiman, les Forces libanaises ont publié un communiqué dans lequel elles affirment que celle-ci est le résultat d'un «meurtre prémédité» qu'elles «considèrent comme un assassinat politique jusqu'à preuve du contraire», en pointant du doigt sans le nommer le Hezbollah.
La principale autorité religieuse maronite, Béchara Raï, s'en est aussi pris au Hezbollah lors de son homélie du 7 avril. «Recourir aux armes fait de vous les plus faibles des faibles... Ne pensez pas que vous êtes forts avec vos armes !», a-t-il déclaré.
Les différents partis chrétiens, à savoir le Courant patriotique libre et les Kataeb, ont apporté leur soutien aux Forces libanaises. Le Premier ministre sortant Najib Mikati a lui appelé à la retenue et à la poursuite de l'enquête.
«Ce qui pousse le Liban vers la guerre civile, ce sont les accusations erronées», selon Nasrallah
Face aux accusations à peine voilées contre son parti, Hassan Nasrallah a pris la parole dans la soirée du 8 avril. «Ce qui pousse le Liban vers la guerre civile, ce sont les accusations erronées», a-t-il déclaré. «Cette affaire n'a rien à voir avec la politique ni avec le Hezbollah, il s'est avéré que c'est un gang, composé de Syriens et de Libanais, qui en est responsable», a-t-il encore martelé.
Le leader de l'organisation pro-iranienne s'en est pris aux différents partis de l'opposition : «La levée du voile sur le sort de la personne enlevée est un véritable scandale pour les FL et les Kataëb, et prouve que ces deux partis ne cherchent pas la vérité ni la justice, mais la discorde et la guerre civile». «Leurs partisans sont descendus dans la rue et nous les avons entendus appeler à sortir les armes, alors qu'ils prétendent être des partis démocratiques et propres», a-t-il en outre dénoncé.
Depuis le début de la guerre à Gaza, les principaux partis chrétiens reprochent au Hezbollah d'entraîner le Liban dans une guerre contre Israël. Le chef du Courant patriotique libre Gebran Bassil, pourtant allié du parti chiite depuis 2006, a ainsi déclaré le 5 avril : «Celui qui pense pouvoir contrôler les Libanais et veut en même temps vaincre Israël se fait des illusions.» Le 6 avril, Samir Geagea, chef de file de l'opposition à l'organisation pro-iranienne, a quant a lui affirmé : «Nous n'avons pas permis qu'ils nous imposent un candidat à la présidence, et nous ne le permettrons pas.». Le pays du Cèdre est sans président depuis le 31 octobre 2022 et la fin du mandat du général Aoun.