Comme l'a révélé le 11 mars le journal NZZ am Sontag, Berne a l'intention de se débarrasser prochainement de 60 systèmes de défense sol-air Rapier, une batterie antiaérienne développée par la British Aircraft Corporation dans les années 1960 pour le compte de l’armée britannique. La Suisse n'entend ainsi pas voir ces armements réutilisés ailleurs, à commencer par le sol ukrainien.
La Suisse avait acheté 60 batteries Rapier – utilisées par les Britanniques lors de la guerre des Malouines – en 1980 et les avait modernisées à plusieurs reprises, avant qu’elles ne soient déclassées et déclarées inaptes au service fin 2022. Il s’agit désormais de mettre au rebut ces armements. «Une première tranche du système d’armes Rapier a déjà été démontée. Trois autres suivront», a indiqué au Monde Kaj-Gunnar Sievert, porte-parole d’Armasuisse, l’office fédéral de l’armement du ministère de la Défense.
Berne inflexible sur sa neutralité
Si la Suisse s’est associée aux sanctions contre Moscou, elle ne dévie pas de sa position en matière de livraisons d’armements, et l’armée helvétique s’apprête à mettre hors service d’autres systèmes d’armes étrangers ces prochaines années, à commencer par des chars d’infanterie M113 ou encore des canons d’artillerie de type M109. La Confédération helvétique, se basant sur une loi stricte encadrant les exportations de matériel militaire, avait déjà fait part de son opposition à l'envoi d'armes en Ukraine, interdisant notamment à l'Allemagne d'envoyer à Kiev des munitions de fabrication suisse destinées aux blindés de défense antiaérienne Gepard.
Alain Berset, le président de la Confédération suisse, a rappelé dans une interview accordée à NZZ am Sontag le 11 mars son hostilité à la «frénésie guerrière» qui a cours selon lui «dans certains milieux», avançant que «les armes suisses ne doivent pas être utilisées dans des guerres». «Je comprends et je respecte le fait que d'autres pays aient une autre position», a-t-il déclaré, soulignant que «la position suisse doit également être respectée».
Plusieurs députés suisses ont contesté ce choix, dont le centriste François Pointet selon qui «il est absurde [de mettre] au rebut des armes de défense qui fonctionnent encore», alors que les forces de Kiev auraient pu s'appuyer sur ce matériel pour protéger les cieux. Berne n’a de plus pas jugé utile de contacter Londres pour une éventuelle reprise de ce matériel, Armasuisse expliquant sobrement qu'«il n’est pas courant que la Suisse propose activement l’achat de ses systèmes militaires mis hors service».