Le vice-ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Verchinine a déclaré, après des discussions à Genève avec des représentants de l'ONU, que Moscou «ne s'oppos(ait) pas à une nouvelle prolongation de l'"Initiative de la mer Noire" après l'expiration de son deuxième mandat le 18 mars, mais seulement pour 60 jours».
«Notre position future sera déterminée par les progrès tangibles dans la normalisation de nos exportations agricoles, non pas en paroles mais en actes. Cela comprend les paiements bancaires, la logistique du transport, les assurances, le dégel des activités financières et l'approvisionnement en ammoniac via l'oléoduc Togliatti-Odessa», a précisé Verchinine.
Il a souligné avoir eu dans la ville suisse des discussions «franches et approfondies» avec le patron des Affaires humanitaires de l'ONU, Martin Griffiths, et la secrétaire générale de la Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement (Cnuced), Rebeca Grynspan.
Ces entretiens, a déclaré Verchinine, ont permis de «confirmer une fois de plus que si les exportations commerciales de produits ukrainiens se font à un rythme soutenu et rapportent des bénéfices considérables à Kiev, les restrictions imposées aux exportateurs agricoles russes sont toujours en place».
A New York, Stéphane Dujarric, porte-parole du secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres, a assuré que «les Nations unies restaient complètement impliquées dans l'Initiative céréalière de la mer Noire et pour s'efforcer de faciliter les exportations d'engrais et d'alimentation russes». Un communiqué «complet» est attendu avant la nuit à Genève, selon Dujarric.
Kiev proteste et demande une prolongation de 120 jours
«L'accord sur l'Initiative céréalière de la mer Noire implique au moins 120 jours de prolongation, la position de la Russie de le prolonger de seulement 60 jours contredit donc le document signé par la Turquie et l'ONU», a tweeté le ministre ukrainien des Infrastructures Oleksandre Koubrakov, précisant que Kiev attendait «la position officielle» des Nations unies et d'Ankara, en tant que «garants de l'initiative».
Cet accord dit de la mer Noire, signé en juillet dernier pour 120 jours entre les Nations unies, l'Ukraine, la Russie et la Turquie, a eu pour conséquence d'atténuer la crise alimentaire mondiale provoquée par l'invasion de l'Ukraine le 24 février 2022. Il avait été reconduit en novembre pour quatre mois et a permis d'exporter plus de 24 millions de tonnes de céréales à partir des ports ukrainiens, selon l'ONU.
La Chine est la première destinataire des exportations dans le cadre de l'accord, l'Espagne la seconde et la Turquie la troisième.
L'Ukraine avait demandé la semaine dernière des efforts internationaux pour maintenir ouvertes les voies maritimes en mer Noire utilisées pour le transport de ses céréales. Le secrétaire d'Etat américain Antony Blinken avait réclamé lors du G20 début mars que Moscou reconduise l'accord.
Mais la Russie n'est pas satisfaite d'un autre accord – bilatéral celui-ci – signé aussi en juillet dernier avec l'ONU sur les exportations d'engrais russes. Cet accord court sur trois ans. Moscou se plaint que ses exportations d'engrais, produit de première nécessité pour l'agriculture mondiale, soient de facto bloquées bien qu'elles ne tombent pas sous le coup des sanctions imposées par les pays occidentaux depuis le début de la guerre.
«Les exemptions de sanctions pour les denrées alimentaires et les engrais annoncées par Washington, Bruxelles et Londres sont pour l'essentiel inactives», a réaffirmé Verchinine.