Vers la désescalade ? Après que le Kosovo a fermé son principal poste de passage vers la Serbie le 28 décembre, en réponse aux barricades dressées par des Serbes pour protester entre autres contre l'arrestation d'un ancien policier, le président serbe Alexandre Vucic a annoncé que celles-ci seraient retirées dans un délai de 24h à 48h.
«Les barricades seront démantelées mais la méfiance demeure», a déclaré le chef d'Etat dans la soirée du 28 décembre, durant une rencontre avec des représentants des Serbes du Kosovo près de la frontière kosovare, selon des propos cités par la télévision publique serbe RTSM. Selon les autorités serbes, les Etats-Unis et l'Union européenne (UE) ont apporté la garantie qu'aucun des Serbes du Kosovo impliqués dans les manifestations ne serait poursuivi ou arrêté.
Des dizaines de manifestants du côté serbe de la frontière avaient bloqué à l'aide de camions et de tracteurs la circulation vers le point de passage de Merdare, dès la soirée du 27 décembre. En réaction, les autorités de Pristina ont décidé de fermer le poste frontière le lendemain, après que la police a évoqué un «barrage illégal» empêchant «la libre circulation des personnes et des biens». Pristina a également appelé les forces de maintien de la paix de l'OTAN (KFOR) à dégager les barricades. Le ministre serbe de la Défense Milos Vucevic avait affirmé pour sa part que le blocage des routes était un moyen de protestation «démocratique et pacifique», et que Belgrade gardait ouverte sa ligne de communication avec les diplomates occidentaux pour résoudre cette crise, tout en plaçant ses forces armées en état d'alerte renforcée.
Alexandre Vucic a par ailleurs souligné que les discussions avec les Occidentaux ne se menaient pas avec des «interlocuteurs impartiaux», puisque ces derniers se placent résolument du côté des autorités de Pristina. A l'inverse, comme le rapporte l'agence TASS, le président serbe a remercié la Chine et l'Inde pour leur soutien, et plus particulièrement la Russie pour l'appui apporté selon lui à Belgrade tout au long de cette crise. Une position réaffirmée par le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, avant les déclarations du président serbe.
Il est naturel que la Serbie défende les droits des Serbes
«Nous avons des relations d'alliés très étroites, historiques et spirituelles avec la Serbie», a-t-il ainsi déclaré à la presse, en précisant que la Russie suivait «très attentivement ce qui se passe et comment les droits des Serbes sont assurés». «Et, bien sûr, nous soutenons Belgrade dans les actions qu'elle entreprend», a-t-il souligné. Selon Dmitri Peskov, «il est naturel que la Serbie défende les droits des Serbes qui vivent à côté dans des conditions si difficiles et qu'elle réagisse de manière sévère quand ces droits sont violés».
Les Occidentaux favorables à une «désescalade sans conditions»
De leur côté, les Etats-Unis et l'UE ont appelé le 28 décembre à une «désescalade sans conditions» face à une situation jugée par la Premier ministre serbe Ana Brnabic la semaine dernière comme étant «au bord du conflit armé». «Nous appelons tout le monde à faire preuve du maximum de retenue», ont ajouté le département d'Etat américain et la diplomatie de l'UE dans un communiqué commun.
Plus particulièrement, l'Allemagne s'est inquiétée le 28 décembre du «très mauvais signal» donné par la présence militaire serbe renforcée à la frontière, en dénonçant la «rhétorique nationaliste» que déploierait Belgrade. «Les Serbes du Kosovo devraient immédiatement enlever ces barricades au Kosovo et la Serbie a une responsabilité particulière à cet égard et devrait œuvrer à l'enlèvement immédiat de ces barricades», a déclaré le porte-parole du ministère allemand des Affaires étrangères, Christofer Burger.
Le mouvement conduit par plusieurs centaines de Serbes a commencé depuis le 10 décembre dans le nord du Kosovo, sous la forme de barrages érigés afin de protester contre l'arrestation de Dejan Pantic, un ancien policier serbe. Un tribunal de Pristina a ordonné le 28 décembre que ce dernier soit libéré et placé en résidence surveillée. Début novembre, des centaines de policiers serbes intégrés à la police kosovare, ainsi que des juges, procureurs et autres fonctionnaires avaient massivement quitté leur poste en protestation contre la décision d'interdire aux Serbes qui vivent au Kosovo d'utiliser des plaques d'immatriculation délivrées par la Serbie.
La province serbe du Kosovo a proclamé unilatéralement son indépendance en février 2008. Celle-ci est aujourd’hui reconnue par les Etats-Unis et de nombreux pays occidentaux, mais pas par la Chine, la Russie, l’Inde ou encore l’Espagne. Belgrade soutient la communauté serbe dans cette région peuplée très majoritairement d'Albanais, au moment où Pristina veut asseoir sa souveraineté sur l'ensemble du territoire.