Déjà évoquée lors d'une précédente salve de révélations de la saga «Twitter Files», la porosité qui pourrait s'être développée ces dernières années entre la firme à l'Oiseau bleu et les renseignements américains fait l'objet d'une nouvelle série de publications, partagée le 16 décembre par le journaliste Matt Taibbi. Sur la période qui s'étend de janvier 2020 à novembre 2022, il fait ainsi état de «150 courriels entre le FBI et [un] ancien haut responsable de Twitter».
Le journaliste américain évoque dans ses dernières révélations «un contact constant et omniprésent» entre Twitter et le FBI, «comme s'il s'agissait d'une filiale». Il pointe notamment le nombre élevé de demandes émanant du principal service fédéral de police judiciaire auprès de Twitter, afin de prendre des mesures contre la désinformation en période électorale, «impliquant même des tweets humoristiques provenant de comptes peu suivis».
Des publications humoristiques qui inquiètent les renseignements américains ?
Matt Taibbi soulève la question de la mise en place d'une censure directement liée à certaines publications humoristiques, et des difficultés d'interprétations dont elles semblent faire l'objet dans le monde des renseignements américains, plus particulièrement dans le groupe de travail créé au sein du FBI pour combattre l'influence étrangère.
Le journaliste américain révèle par exemple la capture d'écran d'un récent courriel (novembre 2022, en pleine période des Midterms) émanant du FBI, qui signale à Twitter une publication susceptible de violer son règlement intérieur. Mais, comme le note Matt Taibbi, il s'agit sans conteste d'un commentaire ironique où une certaine Claire Foster écrit : «Je suis un compteur de bulletins de vote dans mon Etat. Si vous ne portez pas de masque, je ne compte pas votre vote (la sécurité avant tout). Pour chaque commentaire négatif sur ce post, j'ajoute un autre vote pour les démocrates.»
Selon les informations collectées par Matt Taibbi, si l'internaute en question a finalement échappé à une suspension de compte, il n'en a pas été de même après d'autres signalements similaires que l'agence fédérale a transmis à Twitter.
Quoi qu'il en soit, ces récentes révélations indiquent que les équipes du réseau social semblent être régulièrement confrontées à des demandes plus ou moins pertinentes du monde des renseignements, quitte à ce que certaines créent la confusion au sein de la société. «Pourquoi aucune mesure n'a-t-elle été prise ?», s'interroge-t-on par exemple en interne, au mois d'octobre 2020, après une demande fédérale d'examiner un tweet de Donald Trump remettant en cause le bon déroulé du scrutin présidentiel en Californie.
«Ce que la plupart des gens considèrent comme "l'Etat profond" est en réalité une collaboration enchevêtrée d'agences d'Etat, d'entrepreneurs privés et d'ONG (parfois financées par l'Etat). Les lignes deviennent si floues qu'elles n'ont plus de sens», conclut Matt Taibbi après avoir pointé la multitude de structures participant activement au phénomène qu'il dénonce dans son dernier fil de publications.
Le 2 décembre, le propriétaire et CEO de Twitter Elon Musk a annoncé la publication à venir de documents internes à Twitter – les «Twitter files» – notamment des échangent d'e-mails entre employés et avec des responsables politiques. Depuis, six publications de ces dossiers sensibles ont été effectués.