Avions multirôle, obusiers automoteurs, lance-roquettes multiples, chars de combat, accompagnés de leurs lots de véhicules logistiques et de munitions… rien ne semble manquer au panier que Varsovie s’est constitué ces derniers mois.
Le 6 décembre, alors même qu'elle recevait ses premiers chars K-2 de combat Black Panther et obusiers K-9 Thunder de facture sud-coréenne, la Pologne a obtenu le feu vert de l’administration américaine pour acquérir 116 chars Abrams supplémentaires. Ceux-ci ne sont pas du tout dernier standard, contrairement aux 250 exemplaires commandés par Varsovie au printemps, mais présentent l’avantage d’être prêts à l’emploi.
L’arrivée de ces blindés d’occasion sur le sol polonais est prévue dans les prochains mois. Cette nouvelle livraison n'aurait pas d’«impact négatif sur l'état de préparation de la défense américaine» note la Defense Security Cooperation Agency (la DSCA, l’agence du Pentagone chargée des exportations d’équipements militaires américains).
Ainsi, à l’horizon 2026, les forces polonaises disposeront de 366 chars américains Abrams. Auxquels s’ajouteront les près de 1 000 K-2 coréens commandés en juillet à Séoul et aux 250 Leopard 2 acquis – et modernisés – auprès de l’Allemagne ces vingt dernières années.
Des blindés par milliers : la boulimie de Varsovie
En plus des chars de combat, la Pologne a également vu large en matière d’artillerie.
Aux côtés du millier de K-2, 648 obusiers autopropulsés K-9 figurent dans la méga commande passée cet été aux Coréens. En prime, Varsovie rajoutait en octobre 288 lance-roquettes multiples K239 Chunmoo à son panier, formant un substantiel complément aux HIMARS américains. La Pologne n’en dispose en effet que d’une vingtaine, mais au printemps son gouvernement a envoyé à Washington une lettre d’intention en vue d’en acquérir 500 supplémentaires.
Un florilège d’armements terrestres qui éclipserait presque les 48 chasseurs F-50 achetés aux Coréens et les projets de Varsovie d’acquérir des F-35 supplémentaires auprès de leur traditionnel allié et fournisseur américain.
Le but de cette boulimie de matériels lourds, à l’heure de l’opération russe en Ukraine : «dissuader l’agresseur» et «assurer la sécurité de la Pologne» martèle Varsovie, qui doit également reconstituer son stock d’armes, après en avoir cédé une bonne partie à son voisin ukrainien. Selon le décompte du Kiel Institute for the world Economy (IFW), un think tank allemand, et selon les dires du ministre ukrainien de la Défense, la Pologne forme avec la Lituanie et l’Estonie le podium des pays ayant le plus aidé l’Ukraine à hauteur de leur PIB.
La Pologne, pont entre l’Ukraine et l’OTAN ?
Polonais et Ukrainiens avaient d'ailleurs renforcé leur coopération bilatérale avant même l’éclatement du conflit avec la Russie.
En juillet 2020, Varsovie et Vilnius avaient scellé avec Kiev le traité du Triangle de Lublin, en référence au traité de 1569 créant l’Union de Lublin entre la couronne de Pologne à celle du grand-duché de Lituanie, régnant sur plus de la moitié du territoire de l’Ukraine actuelle. Sa mouture contemporaine entend soutenir «les aspirations européennes et euro-atlantiques de l’Ukraine» et de promouvoir le développement de l'Initiative des trois mers, lancée en 2016 sous l’impulsion de la Pologne et soutenue par les Etats-Unis.
Les liens entre les deux voisins avaient également été renforcés par l’annonce, le 17 février 2022, d’un pacte de sécurité trilatéral avec la Grande-Bretagne, pilier de l'Alliance atlantique.
Maxime Perrotin