Prenant place derrière le pupitre, le militant panafricaniste Kémi Séba a tenu à saluer l'audience. Une audience d'étudiants et d'ambassadeurs, mais où se cacheraient aussi, selon le militant panafricaniste, les «espions français et américains qui se sont infiltrés dans cette salle». «Je sais qu'ils ne me quittent jamais dans chacun de mes déplacements» a-t-il accusé avant d'ajouter, sarcastique : «nous allons faire en sorte qu'ils ne se soient pas déplacés pour rien et qu'ils aient beaucoup de notes à prendre !».
Le forum Russie-Afrique se tient à Moscou pour une durée de trois jours, et Kémi Séba a participé le 24 octobre à une conférence à l'Institut d'Etat des Relations Internationales de Moscou. L'occasion pour le président de l'ONG Urgences panafricanistes de militer pour un partenariat «sincère» entre l'Afrique et la Russie.
Feu nourri contre l'attitude de «l'Occident» vis-à-vis de l'Afrique
Désireux de révolutionner les relations du continent africain avec ses anciennes colonies, Séba a fustigé «l'élite de France», coupable selon lui de piller «de manière professionnelle et systématique [les] ressources issues [des] sols [du continent africain]».
«Cette même oligarchie de France qui a détruit la Libye, qui a assassiné le colonel Kadhafi, alimentant [et] structurant le terrorisme au Sahel», a-t-il blâmé, rappelant au passage qu'il dissociait «l'élite de France» du «peuple français».
Fidèle à son discours souverainiste, Kémi Séba s'en est pris vertement au Franc CFA, monnaie africaine dans les anciennes colonies françaises, qu'il décrit comme un «système génocidaire économique».
L'essayiste a dénoncé «les dirigeants dirigés» des pays africains, pointant «Alassane Dramane Ouattara (président de la Côte d'Ivoire), Macky Sall (président du Sénégal), Patrice Talon (président du Bénin), Mohamed Bazoum (président du Niger) et Umaro Sissoco Embalo (président de la Guinée Bissau et président en exercice de la Cédéao)», tous coupables selon lui d'être des «marionnettes» qui suivent «les intérêts de l'Occident».
Dénonçant «les coups meurtriers distribués depuis des siècles par l'Occident», Séba a prévenu que «le peuple africain» n'accepterait plus «les partenariats vicieux de gens qui se présentent comme des amis alors qu'ils ne sont là que pour [le] dépouiller».
«L'OTAN mène une guerre à tous ceux qui veulent la souveraineté»
Une réaction qui serait commune entre l'Afrique et la Russie : «comme nous, la Russie subit depuis trop longtemps une guerre qui ne dit pas son nom, orchestrée par l'oligarchie d'Occident.»
Les géants ont tout pour se comprendre [et] pour s'entendre !
Fustigeant la couverture par les «médias occidentaux globalistes» du conflit en Ukraine, il a ainsi dénoncé l'idée selon laquelle «la Russie est un pays impérialiste qui agresserait l'Ukraine». «Nous savons tous pertinemment que l'OTAN mène une guerre à tous ceux qui veulent la souveraineté, l'autodétermination, et disposer de leur propre destinée»
«Vous avez vos Zelensky mais nous autres Africains avons aussi nos Zelensky», a-t-il renchéri ciblant «des dirigeants africains manipulés par l'élite occidentale», davantage attirés par «Paris, Londres, Rome, Washington» que par «les valeurs et la beauté traditionnelles de nos pays». Et d'enfoncer le clou : «Ces Zelensky locaux nous les combattons aussi.»
«Bloc globaliste occidental» contre «bloc des peuples traditionnels»
Kémi Séba juge que le monde est en réalité le théâtre d'une guerre menée par «l'oligarchie de l'Occident contre le reste du monde».
Deux blocs s'affronteraient donc désormais : «Le bloc des peuples traditionnels qui défendent leurs identités, leurs traditions et leurs visons particulières du monde, contre le bloc globaliste néolibéral, économique et sociétal, matérialisé par ce qu'ils appellent "le progressisme".»
«Un Occident dégénéré qui veut imposer son schéma de société au reste de l'humanité, y compris à son propre peuple qui n'est pas toujours d'accord avec cette réalité», a-t-il tonné.
Enfin, Kémi Séba a plaidé pour la conclusion d'un partenariat «sincère» entre l'Afrique et la Russie : «Les géants ont tout pour se comprendre [et] pour s'entendre. Il faut tracer, sur le terrain scientifique, politique, technologique, les nouvelles voies pour avancer.»
«Si le gouvernement russe veut une collaboration radieuse avec l'Afrique, [il] doit véritablement parier sur la jeunesse africaine comme certains l'ont déjà fait. Car [elle] constitue la majorité du peuple africain.» Il a ainsi justifié son propos car, selon lui, la jeunesse africaine «n'a jamais tourné le dos» à la Russie lorsque s'est produit la chute du mur de Berlin, contrairement «aux dirigeants africains».