Paris, par le biais d'un communiqué du ministère des Affaires étrangères, a condamné ce 20 octobre les violences au Tchad contre des manifestants à N'Djamena. «Des violences sont survenues ce matin au Tchad, avec notamment l'utilisation d'armes létales contre les manifestants, ce que la France condamne», souligne le Quai d'Orsay.
Au moins cinq personnes ont été «tuées par balles» dans les affrontements opposant police et manifestants à N'Djamena, a confirmé à l'AFP le médecin-chef de l'hôpital de l'Union Chagoua, Joseph Ampil. Plus tard dans la journée, le porte-parole du gouvernement Aziz Mahamat Saleh a assuré qu'il y avait eu une trentaine de morts dont une dizaine des éléments de forces de l'ordre et plusieurs blessés.
Un journaliste de l'AFP a vu les corps de cinq personnes, dont deux recouvertes du drapeau national, et trois de draps blancs ensanglantés, allongées sur le sol de l'hôpital, situé dans 7e arrondissement de N'Djamena, épicentre des manifestations dans la capitale tchadienne.
Paris «ne joue aucun rôle dans ces événements, qui relèvent strictement de la politique intérieure du Tchad. Les fausses informations sur une prétendue implication de la France n'ont aucun fondement», ajoute le ministère.
Des violences ont opposé ce 20 octobre au matin police et manifestants à N'Djamena où des centaines de personnes se sont réunies à l'appel de l'opposition.
Les Nations unies ont pour leur part déploré les violences et demandé une enquête sur les décès.
«Nous déplorons le recours à la force meurtrière contre les manifestants au Tchad. Les autorités de transition doivent garantir la sécurité et la protection des droits de l'Homme, y compris la liberté d'expression et de réunion pacifique. Les violations signalées doivent faire l'objet d'une enquête», a commenté dans un tweet le Haut commissariat des droits de l'Homme de l'ONU.
La crise intervient après la prolongation pour deux ans de la «transition» qui devait s'achever ce même jour.
Fin septembre, Mahamat Idriss Déby Itno a finalement été maintenu président jusqu'à des élections démocratiques censées se tenir à l'issue d'une deuxième période de transition. Et auxquelles il pourra se présenter.
Mahamat Idriss Déby Itno, soutenu par Paris
Le 20 avril 2021, à l'annonce de la mort du maréchal Idriss Déby, tué par des rebelles en se rendant au front, l'armée avait proclamé son fils Mahamat Déby, général alors âgé de 37 ans, président de la République à la tête d'un gouvernement militaire de 15 généraux, pour une période de transition de 18 mois.
Le nouvel homme fort avait conservé le soutien de Paris, pour qui le Tchad est un point important de sa présence en Afrique. La France avait ainsi été pointée du doigt pour y avoir accepté une transition non constitutionnelle, tout en condamnant dans le même temps un putsch au Mali voisin.
La précision du Quai d'Orsay sur son absence de rôle dans les événements de N'Djamena renvoie aussi au sentiment antifrançais qui se développe dans la région. Le Burkina Faso a connu il y a deux semaines son second coup d'Etat en neuf mois. Des intérêts de la France, dont l'ambassade et deux instituts français, avaient été pris à partie par des manifestants favorables aux nouveaux putschistes.