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Consommation d'alcool, sexualité... avant le Mondial, le Qatar fait face aux critiques

Sous réserve de certaines conditions, la vente de bières sera finalement autorisée pendant la coupe du monde de football au Qatar. Une concession qui n'occulte pas pour autant les polémiques nées depuis sa désignation comme hôte de la compétition.

Malgré la récente autorisation de vendre de l'alcool, le mondial 2022 au Qatar est encore loin de faire consensus. En effet, Doha autorisera les supporteurs munis de billets à acheter de la bière alcoolisée lors des matchs de la Coupe du monde de foot. Mais à des heures bien précises : trois heures avant le coup d’envoi et jusqu’à une heure après le coup de sifflet final, et pas pendant le match, a rapporté le 3 septembre une source au fait des projets pour la compétition à Reuters.

Budweiser, important sponsor de la Coupe du monde détenant l’exclusivité des droits de vente de bières lors de la compétition, servira son breuvage au sein du périmètre accessible uniquement aux détenteurs de billets qui entoure chaque stade, mais pas dans les buvettes ni ailleurs dans le stade.

Boire de l’alcool ou être en état d’ébriété sur la voie publique sont des infractions punies par la loi au Qatar, mais les autorités locales ont annoncé qu’elles allaient appliquer un seuil de tolérance pour les supporters étrangers lors du prochain Mondial. Cette Coupe du monde est en effet la première à se tenir dans un pays musulman, où l’alcool est strictement contrôlé, ce qui présente des défis inédits pour les organisateurs.

Le Qatar pas très en phase avec les mœurs occidentales

Si Doha s'adapte à certaines mœurs occidentales, d'autres sujets restent toutefois sujets à contentieux. C'est le cas notamment des relations sexuelles. Une polémique a pris de l'ampleur après la parution le 18 juin dernier d'un article dans le tabloïd britannique le Daily Star, qui stipulait que les relations sexuelles hors mariage étaient interdites pour les joueurs et les supporteurs sous peine d'une amende de sept ans de prison. «Une source policière déclare : le sexe n'est vraiment pas au menu, sauf si vous êtes mari et femme. Il n'y aura pas d'aventures d'un soir. Tout le monde doit garder la tête froide pour ne pas finir en prison», avait indiqué le quotidien anglais.

En principe, les relations hors mariage sont totalement interdites au Qatar. Un couple non marié ne peut avoir de gestes d'intimité en public, et ne peut pas non plus vivre sous le même toit. Sans quoi, les individus risquent une arrestation, éventuellement des poursuites qui peuvent aboutir à une amende ou à une peine de prison et à une expulsion du pays. Pourtant, cette loi reste très peu appliquée dans les faits, et encore moins pour les touristes ou les expatriés. A titre d'exemple, pour réserver une chambre en couple, il faut en théorie montrer un certificat de mariage. Dans les faits, la plupart des hôtels ne le demandent pas.

La question des relations LGBT n'a, par ailleurs, pas encore été totalement résolue pour la Coupe du monde. La culture locale se veut intransigeante, mais qu'en sera-t-il dans les stades ? «Si un supporter brandit un drapeau arc-en-ciel dans un stade et qu’on le lui enlève, ce ne sera pas parce qu’on veut l’offenser, mais le protéger. Si on ne le fait pas, un autre spectateur pourrait l’agresser», avait justifié en avril dernier Abdullah Al-Ansari, responsable de la sécurité pour la Coupe du monde.

«Tout le monde sera le bienvenu ici, tout le monde se sentira en sécurité», avait de son côté assuré devant la presse en novembre 2021 le président du comité d'organisation du Mondial Nasser Al-Khater.

La question du traitement des travailleurs étrangers au cœur de la compétition

Mais s'il y a bien un autre sujet polémique qui ne cesse de faire parler, c'est bien celui du traitement des ouvriers étrangers affectés à la construction des stades. Le 14 août 2022, plusieurs dizaines les travailleurs étrangers ont manifesté à Doha en plein centre ville pour protester contre le retard de paiement de leurs salaires. Le gouvernement du Qatar a alors avancé qu'«une minorité de personnes qui n'ont pas manifesté de manière pacifique et ont agi en violation des lois sur la sécurité publique risquent l'expulsion sur ordre de la justice».

L'Emirat veille sur son mondial. Car le Qatar a vu les choses en grand : la Coupe du monde 2022 doit être la vitrine de sa réussite. Le pays n'a pas lésiné sur les moyens mis en place pour l’évènement. Outre la construction des sept stades prévus pour la compétition, l’Emirat s’est lancé dans une course contre la montre pour la construction des hôtels de luxe, des routes, des infrastructures touristiques, d’un nouvel aéroport. Pour ce projet pharaonique, le Qatar peut compter sur plus de 2 millions de travailleurs migrants. Depuis que le petit émirat a obtenu les droits d’organiser la compétition sportive, les travaux gigantesques ont nécessité une importante main d’œuvre provenant d’Inde, du Pakistan, du Népal, du Bengladesh et du Sri Lanka majoritairement. 

Or, une enquête publiée par The Guardian en février 2021 avait avancé que plus de 6 500 travailleurs étrangers étaient déjà morts sur les chantiers depuis maintenant 10 ans. Le rapport du magazine anglais estimait que 12 travailleurs étrangers y décédaient en moyenne chaque semaine. Un chiffre qui ne comptabilisait pas les travailleurs migrants provenant des Philippines et du Kenya.

Plusieurs associations humanitaires, telles que Amnesty International, Human Rights Watch ou encore Migrant-Rights, ont voulu alerter les autorités sur des conditions de travail jugées déplorables. Alors que le petit Emirat soigne son apparence, il ne ferait pas bon vivre à travailler sur les chantiers dans cette zone semi-désertique.  

Plusieurs voix s'élèvent également pour appeler au boycott de la compétition internationale. Le 7 août, l’ancien capitaine de l’équipe nationale allemande Philipp Lahm a déclaré son intention de boycotter le mondial. Dans un entretien accordé à Kicker, l’ex-footballeur a notamment dénoncé les conditions de travail des ouvriers qui construisent les stades. « Les droits de l’Homme doivent jouer un rôle plus important dans l’attribution des compétitions ».

En Europe, les opinions publiques semblent plutôt sur cette même ligne. Selon un sondage commandé par l’agence de presse allemande Deutsche Presse-Agentur, 48% des Allemands interrogés seraient en faveur d’un retrait de leur sélection nationale de la compétition. En France, selon le dernier sondage réalisé par Odoxa en avril 2022, 39% des Français seraient du même avis, et 55% d’entre eux se disent prêts à ne pas regarder la compétition.

Malgré l'autorisation de l'alcool, entre le scandale écologique des stades climatisés, les pots de vin de Michel Platini, les conditions dramatiques des travailleurs étrangers et les appels au boycott, le mondial 2022 a déjà remporté la coupe des polémiques.