Les demandes de retrait de contenus pédopornographiques et terroristes en ligne ont, en 2021, presque triplé par rapport à l'année précédente, rapporte l'AFP ce 4 juin. Elles sont passées de 50 000 à 133 000 selon Laurence Pécaut-Rivolier, conseillère à la Cour de cassation et membre de l'Arcom, gendarme de l'audiovisuel qui, à partir du 7 juin, sera chargé de vérifier que les demandes en question ne sont pas abusives, une compétence jusque-là dans les mains de la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL).
«A compter du 7 juin 2022, le contrôle en matière de blocage, de retrait et de déréférencement administratifs de contenus des sites terroristes et pédopornographiques sera opéré par la personnalité qualifiée désignée par l’Arcom [...]. Elle succède ainsi dans ces missions [au] conseiller honoraire à la Cour de cassation et président de la formation restreinte de la CNIL», peut-on en effet lire dans un communiqué conjoint des deux autorités administratives, publié à la mi-mai.
Près de neuf fois sur dix, les demandes de retrait visent des contenus pédopornographiques
En 2021, les différentes demandes pour restreindre l'accès à des contenus pédopornographiques (retrait, mais aussi blocage de sites par les fournisseurs d'accès et déréférencement) se montaient à quelque 118 000, et à environ 15 000 pour ceux à caractère terroriste.
Dans près de neuf cas sur dix, il s'agissait donc de contenus pédopornographiques, mais la proportion des contenus terroristes progresse. Avec des enjeux différents. «La pédopornographie, on la trouve essentiellement sur des petits sites, sur le dark web et autres car ceux qui en veulent vont la chercher. Pour l'apologie du terrorisme, il s'agit au contraire de toucher le plus vaste public possible, donc qu'on en trouve sur des supports et des opérateurs plus connus», explique Laurence Pécaut-Rivolier, ici citée par l'AFP.
«Pour la pédopornographie, il y a une grande diversité de contenus : aussi bien des contenus amateurs que professionnels à vocation pécuniaire, des films, des photos, des mangas», souligne la magistrate, selon qui beaucoup proviennent des pays de l'Est.
Pour leur part, «les contenus d'apologie du terrorisme, postés par des organisations comme Daesh sont souvent des petits films quasi professionnalisés», poursuit-elle en évoquant par exemple des images de propagande très fortes enchaînant «de manière quasi instantanée des scènes de décapitations et d'autres montrant des pères affectueux avec leurs enfants».
Pour évaluer le bien-fondé des sanctions, il faut selon l'AFP répondre à une question essentielle : ces contenus correspondent-ils bien à la définition qu'en donne la loi ? «Pour l'apologie du terrorisme, ça nous ramène à une difficulté d'analyse : à partir de quand et jusqu'où ça va ?», interroge Laurence Pécaut-Rivolier, en citant un cas auquel son prédécesseur a été confronté : «C'était au moment des Gilets jaunes, une image terroriste avait été mise en avant par un internaute, qui écrivait en dessous : "Quelle idée de se fatiguer autant alors qu'il suffit de bloquer les postes d'essence pour mettre le souk."», se souvient-elle, ajoutant : «Ça avait été considéré comme une apologie du terrorisme alors qu'on n'était manifestement pas là-dedans.»