Une présence qui interroge sur la sécurité à l'entrée des enceintes sportives de la capitale, à deux ans des Jeux Olympiques. Un jeune influenceur, prénommé Ibrahim mais plus connu sous le nom de son compte sur Instagram devenu son surnom, «Challenger.67», a filmé son entrée au Stade de France dans un contexte chaotique lors du match Liverpool-Real Madrid le 28 mai, quelques jours après s'être exercé au tir à la Kalachnikov dans un endroit présenté comme la Syrie.
Sur la vidéo du 28 mai, l'homme se filme passant les portiques de sécurité, qui semblent pourtant bloqués. L'animateur Cyril Hanouna, présent au même moment, est interpellé par l'influenceur alors qu'il essaie de passer le portique et que le personnel paraît débordé. «Je suis plus connu que Cyril !», lance «Challenger» avant de franchir le tourniquet, sans que l'on sache s'il pénètre par fraude dans l'enceinte. «C'est juste parce que c'est toi», lui dit cependant une femme qui semble chargée du contrôle des billets à qui il fait la bise avant de se retourner pour se moquer de l'animateur qui ne franchit la barrière qu'après lui. L'entourage de Cyril Hanouna a cependant précisé au Figaro qu'il n'avait aucun lien avec le jeune homme.
Au-delà de cette mise en scène qui caractérise souvent les influenceurs, il semblerait que «Challenger» revenait tout juste d'un voyage effectué supposément en Syrie, à l'occasion duquel il s'était filmé en train de tirer avec un fusil d'assaut Kalachnikov.
«Ça tire comment? Ça fait comment?», y hurle-t-il, reprenant la formulation employée lors d'une de ses précédentes vidéos dans laquelle il se moquait d'un membre des forces de l'ordre chargé de faire respecter le confinement.
Et ses comparses de répondre en chœur : «À la Kalachnikov!», avant qu'il ne lâche une rafale, dans un endroit désert. «Challenger», suivi par près de 82 000 abonnés, est également proche d'une autre figure des réseaux sociaux, Rayanne B., qui s'est également filmé, tirant cette fois-ci au lance-roquettes. Ce dernier — qui s'était déjà fait remarquer pour une vidéo dans laquelle il volait du matériel à des pompiers — avait raconté la fin de leur voyage commun «à la frontière de la Syrie et du Liban», expliquant être «bien arrivés en Syrie», puis affirmant que l'armée syrienne les aurait interpellés et interrogés sur ces tirs sauvages en dehors de tout cadre légal, avant de les expulser du pays.
Des affirmations impossibles à vérifier, mais qui ont d'ores et déjà conduit le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin à demander aux services de police d'effectuer un signalement auprès de la justice concernant «Challenger» et à déclencher des investigations «pour faire toute la lumière sur les circonstances dans lesquelles ces vidéos ont été prises», selon les termes du ministère cités par le Figaro.
Plusieurs personnalités de droite demandent des comptes
Le cas de l'influenceur a suscité plusieurs réactions politiques, dont celle de la vice-présidente de Reconquête! Marion Maréchal-Le Pen, qui a interpellé le ministre de l'Intérieur. «Comment deux hommes rentrés de Syrie il y a quelques jours, après avoir tiré à la Kalachnikov et au lance-roquettes, ont pu se rendre au Stade de France librement ?», s'est-elle interrogée.
Président d'honneur du parti d'Eric Zemmour, Gilbert Collard s'est insurgé contre cette présence de deux jeunes revenus de ces séances de tir supposément en Syrie, «en plein procès des attentats du Bataclan» [en 2015]. «Tout va bien dans le pire des mondes !», a-t-il déploré.
La polémique a d'ailleurs franchi les Pyrénées : le parti de droite radicale Vox s'est alarmé de telles failles dans la sécurité des stades français. Jorge Buxadé, l'un des responsables du parti, s'est ému de l'entrée de personnes revenues de Syrie dans le stade. Tout en condamnant les agressions dont ont été victimes certains supporters du Real Madrid le 28 mai, il a estimé que «la sécurité de l'Europe [était] compromise par le manque de contrôle aux frontières».
Selon un avocat interrogé par Le Figaro, les activités «touristiques» des deux influenceurs, s'ils se trouvaient bien en Syrie, pourraient faire l'objet de poursuites par la justice française, compétente pour les infractions commises par des Français à l'étranger.