France

Crise en Ukraine : la classe politique française divisée sur le rôle de l'OTAN

Pour Marine Le Pen, l'OTAN est «une gigantesque machine à vendre de l'armement américain», alors que Jean-Luc Mélenchon a estimé que les Français devaient «être non alignés». Valérie Pécresse a plaidé pour un «rapport de force» avec la Russie.

L'inflation des tensions en Ukraine a amené la plupart des figures politiques en France, notamment les candidats à l'élection présidentielle, à se positionner sur le rôle de l'OTAN et de la Russie dans cette crise, et sur les possibilités pour éviter une guerre.

Pour Marine Le Pen, la situation «peut effectivement très mal tourner». La candidate du Rassemblement national a estimé sur France Info ce 20 février, que l'Occident devait admettre «que l'Ukraine ne rentrera pas dans l'OTAN», l'une des principales revendications russes, «réclamer évidemment à la Russie de sortir définitivement du Donbass», «faire appliquer les accords de Minsk» et «reconnaître l'intégration de la Crimée à la Russie». A propos de l'OTAN même, dont la France a rejoint le commandement intégré en 2009, Marine Le Pen a jugé que l'organisation transatlantique était «devenue une gigantesque machine à vendre de l'armement américain, et un organe sous direction américaine».

Son rival à droite Eric Zemmour, qui «ne croit pas» à une invasion russe en Ukraine, a pour sa part estimé ce 20 février sur Europe 1 et CNews que l'extension de l'OTAN depuis trente ans vers l'est de l'Europe «est vue légitimement comme une agression par la Russie». Pour le candidat de Reconquête !, la France est perçue «par les Russes comme les petits télégraphistes de Washington» et sa «parole ne vaut rien» dans les tentatives de négociations. Eric Zemmour s'est placé sur la même ligne que Marine Le Pen, jugeant qu'il fallait que les frontières de l'Ukraine soit «reconnues par la Russie» et en échange «l'OTAN doit s'engager à ce que l'Ukraine ne rentre jamais» dans l'organisation.

Le député et candidat à la présidentielle Nicolas Dupont-Aignan a avancé un programme similaire, demandant le «respect strict des accords de Minsk : élections libres au Donbass, neutralité de l'Ukraine hors OTAN, retrait des troupes russes et levée des sanctions contre la Russie».

Pour François Asselineau, autre candidat souverainiste à la présidentielle, «la Russie a toujours affirmé que l'expansion de l'OTAN vers l'Est violait les engagements occidentaux pris à l'époque» de la chute de l'URSS. «La redécouverte des archives, qui confirme la version russe, revêt aujourd'hui une importance capitale avec le cas ukrainien», a déclaré le président de l'UPR.

«Les Etats-Unis et leurs vassaux n'ont fait que des guerres bidon depuis des décennies. Sous des faux prétextes. Contre des fausses menaces. Avec des objectifs cachés. Souvent grossiers. Il faut être sacrément naïf pour penser que cette fois c'est différent», a pour sa part constaté le leader des Patriotes Florian Philippot.

A gauche, le candidat LFI Jean-Luc Mélenchon a aussi regretté que la France soit «alignée ostensiblement sur les Etats-Unis d'Amérique». «Les Français doivent être non alignés, ni avec l'un ni avec l'autre. Cela signifie comme conséquence pratique que les Russes ne doivent pas passer la frontière de l'Ukraine, qui doit être respectée absolument, et les Américains ne doivent pas chercher à annexer l'Ukraine dans l'OTAN», a-t-il insisté sur France 3. Comme Marine Le Pen et Eric Zemmour, le député insoumis a plaidé pour que la France quitte le commandement intégré de l'OTAN, dont elle avait été absente entre 1966 et 2009.

Valérie Pécresse sur une position de fermeté vis-à-vis de la Russie

Autre son de cloche de la part de la candidate Les Républicains Valérie Pécresse, qui a le 19 février choisi de cibler la Russie, envers qui il faudrait selon elle tenir «un discours d'une fermeté d'acier» et la menacer de «sanctions drastiques» pour mettre fin à ses «actes d'agression» contre l'Ukraine. «Il faut du dialogue mais aussi du rapport de force», a-t-elle poursuivi sur France Culture. «Faire la guerre à l'Ukraine est une erreur majeure, rompre les accords de Minsk, c'est une faute», a ajouté la candidate à l'Elysée en référence aux accords de 2015 censés pacifier l'est séparatiste de l'Ukraine. Mais «si la Russie se retire, tout redevient possible», a-t-elle estimé, notamment la perspective d'une conférence sur la sécurité en Europe, et pouvoir dire à l'Ukraine que son adhésion à l'OTAN «n'est pas à l'ordre du jour».

Sur Radio J ce 20 février, le secrétaire d'Etat aux Affaires européennes Clément Beaune a par ailleurs reproché à la droite et la gauche françaises une forme de «capitulation» face à la Russie. «Ils ne veulent pas que l'Etat soit ferme à l'égard de la Russie, ça ça s'appelle l'esprit munichois, la capitulation», a-t-il affirmé. L'accord de Munich de 1938 qui a permis l'annexion allemande des Sudètes, un territoire situé à l'est de l'Allemagne, dans l'ancienne Tchécoslovaquie. Une annexion qui est restée dans l'Histoire comme un symbole de capitulation diplomatique face à l'Allemagne nazie, un an avant le déclenchement de la guerre.