France

Nombreux appels à lutter contre les passeurs après la noyade de migrants dans la Manche

La mort de 27 migrants dans le naufrage d'une embarcation dans la Manche a entraîné de nombreuses réactions de la part d'associations, de riverains et de responsables politiques. Beaucoup d'entre eux dénoncent le rôle des passeurs dans ce drame.

Le naufrage d'une embarcation de migrants dans la Manche ayant fait 27 morts le 24 novembre a suscité de nombreuses réactions mêlant émoi et indignation. Des responsables politiques de tous bords ont mis en cause le rôle des passeurs dans ce drame.

Le gouvernement s’en prend à ceux qui «organisent des traites d'êtres humains»

Dans un communiqué, Emmanuel Macron s'est exprimé en ces termes : «C'est l'Europe dans ce qu'elle porte de plus profond – l'humanisme, le respect de la dignité de chacun, qui est endeuillée ce soir». 

Le président de la République française a également exprimé sa «compassion» et «le soutien inconditionnel de la France» aux familles des victimes. Il a enfin assuré que «tout [serait] mis en œuvre pour retrouver et condamner les responsables». «La France ne laissera pas la Manche devenir un cimetière», a-t-il ajouté. Le chef de l'Etat a par ailleurs appelé le Premier ministre britannique Boris Johnson à ne pas «instrumentaliser une situation dramatique».

Le Premier ministre Jean Castex a quant à lui réagi sur Twitter à cette «tragédie» : «Mes pensées vont aux nombreux disparus et blessés, victimes de passeurs criminels qui exploitent leur détresse et leur misère.» Le chef du gouvernement a également indiqué que le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin se rendait sur place.

A Calais, ce dernier a estimé que les «les premiers responsables de cette ignoble situation sont les passeurs, c'est-à-dire des criminels qui pour quelques milliers d'euros organisent des traites d'êtres humains».

Gérald Darmanin a confirmé cette position sur RTL dans la matinée de ce 25 novembre, en affirmant que «des femmes enceintes et des enfants» étaient morts hier.  

Des responsables politiques de tous horizons expriment leur compassion et appellent à la responsabilité 

Sur BFM TV, la candidate du RN à la prochaine élection présidentielle Marine Le Pen s'est dite «horrifiée» et a mis en cause «le laxisme» du gouvernement en matière migratoire, notamment sa «faiblesse coupable» selon elle à l’égard des réseaux de passeurs qui font de la «traite d'êtres humains». 

«Honte à qui a rendu ça possible et d'abord aux passeurs», a déclaré sur Twitter Jean-Luc Mélenchon, chef de file de la France insoumise (LFI). «Il faut ouvrir un accès sûr en Angleterre. La France n'est ni garde-frontière ni geôlière au service du Royaume-Uni», a-t-il ensuite suggéré.

Son collègue député LFI de la Somme François Ruffin a quant à lui évoqué des «victimes de la misère, victimes des passeurs, victimes d’une politique de garde-frontière du Royaume-Uni indigne de la France». «Revoir les accords du Touquet, d’urgence», a-t-il recommandé. En vigueur depuis 2004, ces accords fixent la frontière britannique sur la côte française. En contrepartie, Londres s'acquitte d'une compensation financière dont les montants sont régulièrement renégociés. Cette année, le Royaume-Uni s'est ainsi engagé en juillet à verser à la France 62,7 millions d'euros supplémentaires.

«L'horreur et l'effroi», a commenté le candidat du Parti communiste à la prochaine présidentielle Fabien Roussel. «Combien de temps allons-nous encore accepter que des hommes, des femmes, des enfants meurent sous nos yeux ?», s'est-il interrogé, avant d'affirmer que la France «n’est plus elle même quand elle n’agit pas pour la fraternité et des réponses humaines». 

Autre candidat à l'élection présidentielle de 2022, l'écologiste Yannick Jadot a évoqué une «terrible nouvelle en Manche», en apportant «tout [son] soutien aux proches des victimes, aux rescapés du naufrage, aux marins de la Marine nationale ayant procédé à ce sauvetage courageux, ainsi qu'à l'ensemble des acteurs de la solidarité actifs dans la région, en mer comme à terre.»

La maire de Paris et candidate PS à la magistrature suprême Anne Hidalgo a également appelé les autorités «à prendre leurs responsabilités et à mettre fin aux agissements des passeurs». «Nous ne pouvons pas rester les bras croisés. Il est temps de faire preuve d’humanité à nos frontières», s'est-elle indignée.

Unanimité contre les passeurs chez les candidats à l'investiture LR

La candidate à l'investiture de Les Républicains Valérie Pécresse a également visé les passeurs qui «organisent ces transferts mortels» et «sont responsables de cette scandaleuse tragédie». «Ils doivent être implacablement poursuivis et sanctionnés !», s'est-elle exclamé sur le réseau social à l'oiseau bleu. 

Son concurrent Xavier Bertrand a quant à lui exprimé sa «profonde émotion et colère». «Pour mettre un terme à ces drames, il faut encore renforcer les moyens pour briser les réseaux de passeurs, ces criminels qui exploitent la misère», a-t-il affirmé. 

Autre candidat à l'investiture LR, Michel Barnier a évoqué sur TF1 une «tragédie prévisible», avant d'afficher sa position : «Ces hommes et ces femmes, leur misère est exploitée, il faut être impitoyable, il faut des frontières qui ne soient pas des passoires. Il faut demander aux Britanniques d'accueillir chez eux toutes ces personnes qui veulent avoir le droit d'asile chez eux et pas ailleurs, en réformant les accords de Touquet.»

Eric Ciotti, député des Alpes-Maritimes lui aussi candidat à l'investiture LR a parlé sur Twitter d'un «drame abominable qui doit nous pousser à agir», avant de s'exprimer en ces termes : «Les passeurs et leurs complices ont une responsabilité écrasante. La France et l'Europe n'ont pas les moyens d'intégrer cette immigration massive irrégulière, il faut la stopper. Dire le contraire c'est risquer des vies.»

Une cinquantaine de manifestants rassemblés près du port de Calais

Dans la soirée du 24 novembre, une cinquantaine de personnes se sont rassemblées à proximité du port de Calais en hommage aux 31 migrants décédés dans le naufrage de leur embarcation. «Calais, traitements inhumains et dégradants», «Calais, droits humains outragés, brisés, martyrisés», pouvait-on lire sur des pancartes, comme l'indique l'AFP. «Darmanin, assassin, t'as du sang sur les mains», «La honte, Bouchart [la maire de la ville] Calais devient un corbillard», ont aussi scandé les manifestants.

«Ça nous insupporte de voir les politiques dire que c'est la faute des passeurs au lieu de prendre leurs responsabilités par rapport à la situation à Calais», a tancé Clara, l'une des manifestants qui ont allumé des petites bougies. «On est là pour se recueillir parce qu'on est tristes, parce que on en a marre de compter les morts», a-t-elle ajouté.

Pour Lucie, bénévole à Calais interrogée par l'AFP, «il faudrait mettre en place un passage sécurisé de ces personnes en Angleterre de manière contrôlée pour empêcher encore plus de morts.» Quand les migrants lui font part de leur objectif de traverser la Manche, «on ne les encourage pas, on ne les arrête pas non plus. C'est leur choix. On leur donne juste la dignité ici le temps qu'il reste», a-t-elle expliqué. «Avec des barrières de plus en plus hautes, ce drame était à prévoir, c'est affolant. Ils n'avaient déjà pas de logements hier et aujourd'hui ils sont sans vie», s'est quant à elle désolé Anne, une habitante de Calais.

Horrifiées par le drame, de nombreuses ONG ont également plaidé pour une politique d'asile moins dure et la mise en place de routes «sûres».