France

Huées, altercation et exfiltration : tensions entre des journalistes de BFM et des manifestants

Pris à partie par des manifestants anti-pass sanitaire à Paris, deux journalistes de BFM ont du quitter les lieux avec l'aide de leurs gardes du corps. Un reporter de la chaîne s'en est par la suite pris au téléphone d'un manifestant.

Alors qu'ils couvraient le rassemblement contre l'extension du pass sanitaire organisé le 22 juillet devant le Sénat, dans le VIe arrondissement de la capitale, deux journalistes de la chaîne de télévision BFM TV ont été confrontés à une foule hostile à leur endroit. Accompagnés par leurs gardes du corps, les deux professionnels de l'information n'ont pas été blessés physiquement mais ont été contraints de plier bagage, sous la pression de la foule, qui scandait «BFM collabo».

Plusieurs vidéos partagées sur les réseaux sociaux témoignent de ce départ précipité, les journalistes se voyant suivre sur plusieurs mètres par les manifestants, jeter de l'eau et subir des insultes, telles que «BFM, p*te à Drahi !», en référence au propriétaire de la chaîne. Dans une scène de confusion absolue, on voit l'un des journalistes en mesure de se déplacer tandis que sa collègue est exfiltrée à bout de bras par un des gardes du corps ainsi qu'un policier, avant d'être déposée au sol quelques dizaines de mètres plus loin.

Le reporter de BFMTV, Igor Sahiri, quitte alors le cortège en marchant, sous l'œil du smartphone du Gilet jaune Jamel Bouabane, qui filme la scène de manière rapprochée. C'est alors que le journaliste de BFM, visiblement irrité par le fait d'être filmé, prendre l'initiative, sous la protection de son garde du corps, d'asséner une volée de sa main droite au téléphone portable du manifestant. La tension est par la suite retombée.

Un épisode qu'a donc vécu au cœur de l'action Jamel Bouabane puisque, comme il l'explique aujourd'hui à RT France, le téléphone qu'il utilise habituellement pour filmer dans les manifestations est désormais cassé. «Je dois racheter un autre téléphone mais je ne porterai pas plainte comme certains me l'ont suggéré. Je n'ai pas de rancœur, je suis contre le boycott de gens dans les manifs», témoigne-t-il. «Vers la fin, tout le monde s'est calmé, on a échangé de façon plus détendue, mais c'était pas une raison de casser mon téléphone», résume Jamel Bouabane.

Contacté par RT France également, le journaliste de BFM TV Igor Sahiri témoigne du brûlant contexte dans lequel s'est déroulée la scène.

«Après avoir été chassés, insultés, provoqués et menacés violemment par une horde de gens haineux sur 200 mètres, j'ai dit au moins dix fois à ce gilet jaune d’arrêter de me filmer à 10cm de mon visage. Ce monsieur ne me calcule même pas. Il ne me parle pas et continue de filmer. Pourquoi ? J’en sais rien. Il n’y avait aucun intérêt à le faire. Si ce n’est attendre que ça dérape», nous explique-t-il. «Je finis par lui enlever son téléphone des mains, par la force. Car c’est insupportable. La police intervient. Ça se calme. Et on rediscute avec ce monsieur. Je n’ai donc agressé personne», souligne encore le reporter de terrain.

BFM TV annonce son intention de porter plainte

Après les manifestations d'hostilité envers ses journalistes, BFM TV a annoncé qu'elle porterait plainte et a invité son reporter à relater son témoignage en plateau.

Ils nous reprochent de ne pas dire la vérité

Le reporter a remercié ses gardes du corps présents sur place, et a expliqué : «On m'a empêché de faire mon travail avec une grande violence [...] Lorsque je termine mon direct, je comprends qu'on m'a reconnu, qu'on a reconnu la chaîne [...]. On arrive vers moi, une personne, puis deux, puis trois, puis 50, puis 100 : là, la tension monte d'un cran.»

«Sans eux, sans doute que ça aurait été physiquement violent, heureusement il n'y a pas eu de coups, en revanche il y a eu un torrent de haine», souligne-t-il, sans toutefois évoquer l'altercation avec le manifestant. Le journaliste explique par ailleurs les hostilités le visant par une défiance des manifestants envers le monde médiatique. «En gros, ils nous reprochent de ne pas dire la vérité, BFM TV comme les autres médias d'ailleurs [...] Je ne faisais que raconter les discussions que j'avais pu avoir avec les différents profils de personnes [sur place], je ne faisais que mon métier», relate encore le journaliste.

La scène, qui rappelle des épisodes similaires lors de certaines manifestations de Gilets jaunes, a été commentée dès son lendemain par le ministre de l'Intérieur en personne. «Soutien aux journalistes de BFM TV insultés et menacés hier lors d’une manifestation à Paris alors qu’ils ne faisaient que leur travail. La liberté d’informer est un droit fondamental», a-t-il écrit sur les réseaux sociaux.