L'Elysée a fait savoir qu'Emmanuel Macron avait réuni plusieurs ministres le 9 juin pour réclamer une meilleure efficacité des expulsions – toujours mal appliquées – d'étrangers en situation irrégulière alors que le gouvernement s'attend à un afflux d'arrivées post-Covid.
Cette réunion s'est déroulée en présence du Premier ministre Jean Castex et des ministres Gérald Darmanin (Intérieur), Jean-Yves Le Drian (Affaires étrangères) et d'une représentante du Garde des Sceaux Eric Dupond-Moretti.
«Les demandes d'asile sont de plus en plus détournées : les étrangers demandent systématiquement l'asile en sachant que l'examen de leur dossier dure plusieurs mois et qu'ils sont pris en charge de manière très avantageuse», a commenté un conseiller auprès de l'AFP, avant de relever que le «taux d'acceptabilité de l'immigration» en France était «de plus en plus bas».
Aussi, le chef de l'Etat a-t-il demandé aux ministres «d'activer de manière volontariste les dispositifs en vigueur» et d'intensifier les négociations avec les pays d'origine pour qu'ils acceptent le retour de davantage de leurs ressortissants. Sur environ 120 000 demandeurs d'asile par an, 20 000 obtiennent le statut de réfugiés, 20 000 repartent et 80 000 se maintiennent illégalement sur le territoire. «Nous avons un problème d'éloignement», a reconnu la présidence, qui estime que «notre système est très difficile à activer pour des raisons politiques, diplomatiques et médiatiques» – même si le taux d’exécution des décisions d'expulsion s'est amélioré d'un tiers, selon l'AFP.
Un taux d'expulsions deux fois plus bas que la moyenne européenne
Fin 2020, la commissaire européenne aux Affaires intérieures avait estimé devant le Sénat que le taux d'exécution moyen d'une décision d'expulsion est de 30% en Europe mais chute à «13,14% pour la France» ; l'Elysée avançant de son côté le chiffre de 15,3%.
Le chef de l'Etat – qui au début de son quinquennat évoquait l'objectif d'un taux d'exécution de 100% – a demandé le 9 juin des mesures «opérationnelles très rapidement», en ciblant en priorité l'expulsion des étrangers irréguliers auteurs d'actes de terrorisme ou fichés pour radicalisation, ainsi que ceux ayant commis des crimes et délits et autres infractions graves.
L'objectif est de les emmener directement à l'aéroport dès leur sortie de prison, grâce à une coordination des administrations. Sur 1 115 étrangers en situation irrégulière et fichés pour radicalisation, 601 ont quitté le territoire national et 514 y sont encore – bien souvent parce qu'ils sont incarcérés. Environ 250 étrangers relevant de cette catégorie pourraient être expulsés dans les semaines qui viennent, selon l'Elysée.
Les étrangers irréguliers ayant commis des crimes et délits feront aussi l'objet d'expulsions systématiques. «Il s'agit essentiellement de personnes venant du Maghreb – Algérie, Maroc, Tunisie – mais aussi de Russie et d'Afrique», affirme la présidence de la République. La France compte insister auprès de ces pays pour qu'ils accordent davantage de laissez-passer consulaires qui permettent les retours. Elle veut aussi obtenir que le test PCR désormais exigé soit effectué non pas au départ de France mais à l'arrivée. «On ne peut pas les obliger à subir ce test PCR exigé au départ et ceux qui soutiennent leur cause leur disent que le meilleur moyen de rester en France est de refuser le test», a souligné l'Elysée. «Le président a demandé que les négociations diplomatiques soient engagées de manières très volontaristes. Avec l'Algérie – avec qui les discussions sont plus difficiles – nous envisageons des mesures plus drastiques et nos demandes seront portées à leur connaissance très rapidement», a averti la présidence française sans autre détail.
Sans modifier le droit d'asile, une réflexion est également engagée sur les pays considérés comme sûrs.