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France 3 Franche-Comté a-t-elle subi des pressions de la préfecture pour imposer Le Maire au JT ?

Alors que Bruno Le Maire se rendait en Haute-Saône le 19 février, la préfecture aurait fait preuve d'intimidation pour placer le ministre à l'antenne de France 3 Franche-Comté. L'intersyndicale des journalistes de la chaîne dénonce un chantage.

Le 18 février, à la veille d'un déplacement du ministre de l'Economie et des Finances à Arc-lès-Gray, la préfecture de Haute-Saône aurait, face au «peu d'empressement» suscité par la venue ministérielle, averti des journalistes du bureau de France 3 de Vesoul, «qu’elle pourrait bien s’opposer au tournage en cours d’un magazine avec les gendarmes du département, si une équipe n’était pas dépêchée» pour effectuer une couverture en direct de la présence de Bruno le Maire. C'est ce qu'assure un communiqué conjoint des sections syndicales CGT, SUD et SNJ de France 3.

Nous sommes tombés des nues ! Je n'ai jamais vu une chose pareille de toute ma carrière

«Le 19 février, les spectateurs découvrent donc Bruno Lemaire en direct dans le journal. Un choix éditorial, selon la rédaction en chef. Nous ne contestons pas cette décision, mais cela n’excuse en rien le chantage exercé par la préfecture de Haute-Saône. Demander un reportage est une chose, menacer d’interrompre un tournage pour l’obtenir, c’est grave», a souligné l'intersyndicale.

La préfecture aurait répondu qu'il s'agissait d'une «initiative individuelle»

«Ce qui s’est passé en Franche-Comté fleure bon les années 60, l’époque où les conducteurs de JT étaient validés par la préfecture», a lui souligné sur Twitter le SNJ de France Télévisions.

«Ce genre d'information doit se savoir, c'est important pour faire de la prévention contre ce genre de pratiques», a pour sa part commenté Dominique Pradalié, secrétaire générale du SNJ, jointe par RT France. «Les plus grandes censures non seulement encouragent les censeurs, mais font honte à ceux qui n'ont rien dit», a-t-elle ajouté. 

Raoul Advocat, journaliste à France Télévisions et représentant SNJ, a exprimé auprès de RT France la stupéfaction des équipes de journalistes face à ces agissements. «Nous sommes tombés des nues ! Je n'ai jamais vu une chose pareille de toute ma carrière», a-t-il assuré. Selon ses informations, la direction régionale et le rédacteur en chef de France Télévisions ont contacté la préfecture pour «dire de manière très ferme que c'était des méthodes inadmissibles». Selon lui, «les choses ont été faites de tous les côtés» pour dénoncer ces méthodes. La préfecture aurait répondu qu'il s'agissait d'une «initiative individuelle».

L'épisode s'inscrit dans un contexte marqué par de multiples tensions entre les professionnels de l'information et les autorités françaises. Fin 2020, les principales organisations d'éditeurs de presse adressaient un courrier commun au Premier ministre Jean Castex pour exprimer leur inquiétude face à «la multiplication d'actions législatives sanctionnant la presse», et défendre la loi de 1881 qui consacre la liberté d'informer.