France

«Suicide du Parlement» : la prolongation de l'état d'urgence sanitaire critiquée par l'opposition

La prolongation de l'état d'urgence sanitaire a de nouveau été prolongée le 9 février jusqu'au le 1er juin prochain. L'opposition dénonce unanimement une situation d'exception permanente.

Adopté à 278 votes pour, 193 contre et 13 abstentions, la prolongation de l'état d'urgence sanitaire jusqu'en juin prochain a suscité un tollé au sein de nombreux parlementaires issus de l'opposition qui dénoncent une «banalisation» de ce régime particulier.

L'urgence sanitaire a été en vigueur du 23 mars au 10 juillet 2020, puis une nouvelle fois instaurée le 17 octobre. Le Parlement l'a prorogée une première fois jusqu'au 16 février, puis le 9 février jusqu'au 1er juin.

«On a eu l'habitude de l'état d'urgence pour des questions de terrorisme qui ont été inscrites directement dans la loi, finalement on a un état d'urgence permanent et pour nous, c'est extrêmement problématique parce que c'est liberticide et que surtout ça donne les pleins pouvoirs à l'exécutif», a déclaré notamment la députée insoumise Mathilde Panot auprès de RT France. 

«Un homme seul décide de mesures privative de liberté. Ce n'est pas un état d'urgence sanitaire par hasard. On oblige les gens à rentrer chez eux à 18H et ce n'est pas ratifié par le Parlement [...]. C'est un suicide du Parlement, les Français vont juger», a averti de son côté Nicolas Dupont-Aignan au micro de RT France. 

Des critiques ont aussi été fusées du côté de Les Républicains. Le gouvernement «ne doit pas nous entraîner dans des tunnels où le Parlement ne peut se réunir et évaluer l'action publique», a fait valoir le député LR Philippe Gosselin. Le Sénat dominé par la droite avait donné son accord, en première lecture, pour une prorogation jusqu'au 3 mai... et prévu un vote du Parlement au bout d'un mois en cas de reconfinement, en vain.

«Plutôt qu’une prolongation jusqu’au mois de juin, on aurait pu par exemple, imaginer une clause de revoyure mensuelle en fonction de la situation épidémique sur le terrain», a estimé sur Twitter le député LR Fabrice Brun ayant voté contre le texte.

«Ce texte donne des pouvoirs exorbitants et sans contrôle au gouvernement ! », a déclaré pour sa part sur Twitter le député Rassemblement national Ludovic Pajot qui a voté contre le texte. 

Des critiques émergent également chez les alliés de la majorité 

De l'autre bord de l'Hémicycle, le communiste Stéphane Peu s'est déclaré «inquiet de l'accoutumance du gouvernement au régime dérogatoire à l'Etat de droit», dans lequel «la France se sera trouvée le plus clair de son temps depuis 2015» avec alors l'état d'urgence post-attentats.

Les critiques se sont même faites ressentir chez les alliés de la majorité : «Nous ne pouvons pas donner tous les trois ou quatre mois de chèque en blanc au gouvernement», a déclaré Olivier Becht, patron du groupe allié Agir, qui ne voit pas la France «traverser toute l'année 2021 uniquement avec des mesures de confinement, de déconfinement, de reconfinement ou de couvre-feu». 

Le ministre de la Santé Olivier Véran a déclaré pour sa part comprendre la «lassitude» face à cet état d'urgence qui dure, mais a aussi jugé la date du premier juin «cohérente au regard de la dynamique de l'épidémie», le temps que «la campagne de vaccination produise pleinement ses effets».