France

Retour du vote par correspondance : le «risque de fraude est trop important», selon Darmanin

L'idée de remettre au goût du jour le vote par correspondance en France, interdit depuis 1975 mais défendu par des élus, a été balayé par le ministre de l'Intérieur dans un communiqué.

La question du retour en grâce du vote par correspondance en France, interdit depuis 45 ans dans le pays, semble être un nouveau sujet de désaccord au sein de la macronie. 

Le 14 novembre, le Journal du dimanche, dans lequel le parlementaire et porte-parole de LREM Roland Lescure, avait plaidé pour un «débat» sur retour en grâce de ce mode de scrutin en période de pandémie, a affirmé que le président de la République n'était pas opposé à l'idée. 

«Il n'a pas du tout l'intention de la balayer d'un revers de la main», a retranscrit le JDD d'après une source non nommée à l'Elysée, pour qui «l'idée est de déboucher sur un consensus politique».

Ce sont les élus du MoDem qui ont relancé la discussion ces derniers jours dans la majorité, en vue des régionales et départementales de 2021. Le parti centriste souligne l'utilité de ce mode de vote par temps de Covid et cite en exemple la «participation historique» à la présidentielle aux Etats-Unis, où les électeurs ont pu voter par courrier.

Gérald Darmanin pointe le risque de fraude

Le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin s'est en revanche opposé ouvertement à la réintroduction du vote par correspondance en France malgré la crise sanitaire. Dans un communiqué partagé sur son compte Twitter, le ministre de l'Intérieur a estimé que son ministère «ne sera pas prêt, en quelques semaines ou quelques mois, à offrir aux électeurs un système robuste et assurant une confiance absolue dans les résultats du vote». «Seul l'isoloir, conquête indispensable de la démocratie républicaine, a permis de garantir que les électeurs soient des citoyens libres et égaux en droit, libres de tenir leur vote secret», conclut le communiqué.

Selon lui, par ailleurs, «les raisons qui ont amené à abandonner le vote par correspondance en 1975 restent valables aujourd'hui : le risque de fraude est trop important». 

Dans un entretien publié sur le site du Parisien le 14 novembre au soir, Gérald Darmanin a dit encore y être hostile. «Tant qu'on n'aura pas démontré que ce mode de vote permet l'absolue décision individuelle, sans pression communautaire ou de la part de la famille, je serai opposé à cette disposition», souligne-t-il. «Il en va de la préservation du libre arbitre de chacun, longue tradition électorale de notre pays depuis l'invention de l'isoloir», insiste le ministre.

A l'inverse, dans un entretien accordé auJournal du dimanche, le député Roland Lescure, porte-parole de LREM, s'est dit «favorable» au vote par correspondance et demande «d'en débattre» au sein du mouvement présidentiel. 

«J'ai vu l'impact très positif du vote par correspondance aux Etats-Unis : sans ce dispositif, il n'y aurait qu'une participation de 38% ; avec, on passe à 67% !», insiste le parlementaire, élu des Français de l'étranger dans la circonscription d'Amérique du Nord. «Il faut se saisir de ce débat afin de faire des propositions au gouvernement, peut-être avec nos partenaires de la majorité. Nous lancerons le travail dans les jours qui viennent», promet-il.

En tant que député des Français de l'étranger, Roland Lescure a lui-même en partie été élu par des votes à distance. Au niveau national, cette pratique postale a disparu fin 1975, car jugée à l'époque propice à de «graves fraudes».

Aux Etats-Unis, où ce mode de scrutin a joué un rôle décisif lors de ces dernières élections, les partisans de Donald Trump ont dénoncé des fraudes massives et des défaillances engendrées par le vote par correspondance. Ces allégations n'ont pour l'heure cependant pas été prouvées, les procédures de recours lancées par l'équipe du président Trump sont encore examinées par la justice américaine.