France

Que sait-on de l'auteur présumé de l'attaque au hachoir près des anciens locaux de Charlie Hebdo ?

Nationalité, âgé prétendu, arrivée en France : de nombreux éléments de l'enquête ont été révélés à propos d'Ali H., l'auteur de l'attaque au hachoir près des anciens locaux de Charlie Hebdo ayant fait deux blessés graves le 24 septembre.

La personnalité et le parcours d'Ali H., auteur présumé de l’attaque au hachoir ayant fait deux blessés graves le 24 septembre à Paris, commencent à être révélés. Peu après les faits qui se sont déroulés dans le 11e arrondissement de la capitale, rue Nicolas-Appert où se trouvait auparavant la rédaction de Charlie Hebdo, Ali H. a été interpellé près des marches de l'Opéra Bastille. Et il n'a pas fait mystère de ses intentions. 

Selon des sources proches de l'enquête citées par différents médias, dont l'AFP, Ali H. a immédiatement reconnu les faits et «assume son acte qu'il situe dans le contexte de la republication des caricatures [de Charlie Hebdo] qu'il n'a pas supportée».

Il se présente comme étant né au Pakistan et se dit âgé de 18 ans. Selon Le Parisien qui cite les premiers éléments de l'enquête, Ali.H a ainsi pu entrer sur le territoire français en 2018 car il s'est présenté comme mineur. Mais son âge réel semble avoir suscité des interrogations. S'il a été pris en charge à partir du 17 août 2018 par l'Aide sociale à l'enfance (ASE) du Val-d'Oise, le département a en effet immédiatement contesté sa minorité auprès de la justice. Les photos d'Ali H. menotté qui ont fuité sur les réseaux sociaux posent légitimement question sur son âge réel.

«Aucun signe de radicalisation»

Malgré la contestation du département, une décision du tribunal des mineurs de Cergy-Pontoise avait confirmé la prise en charge d'Ali H. par l'ASE, le 19 juillet 2019. Le Parisien précise qu'un juge des enfants du tribunal avait refusé de diligenter des examens médicaux de probation (expertise osseuse) à cet effet. Ces examens auraient pu aider à déterminer l'âge réel d'Ali H., mais ils sont réputés peu fiables.

Durant sa prise en charge, ce Pakistanais ne présentait «aucun signe de radicalisation», selon un constat du conseil départemental du Val-d'Oise, qui s'appuie sur les observations de l'ASE. Cependant, s'il est inconnu de la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI), il était néanmoins connu des services de police pour port d'arme prohibé, «un tournevis» retrouvé lors d'un contrôle de la brigade des Réseaux Ferrés. Ce délit lui a valu de faire l'objet d'un rappel à la loi par le tribunal des mineurs de Paris cette année.

La prise en charge d'Ali H. par l'ASE a pris fin le 10 août 2020, date de sa majorité supposée. Depuis, il a séjourné quelque temps dans un hôtel social de Cergy-Pontoise (Val-d'Oise). Une résidence où les policiers se sont rendus le 25 septembre. Ils y ont interpellé l'«ancien colocataire» d'Ali H, avant de découvrir la nouvelle adresse de l'assaillant présumé : un petit immeuble de quatre étages à Pantin (Seine-Saint-Denis) qu'ils ont également perquisitionné.

Ali H. y vivait au premier dans un appartement T2 occupé par d'autres colocataires de la communauté pakistanaise, dont cinq ont été placés en garde à vue dans la soirée.

Deux autres personnes, le frère et une connaissance d'Ali H., ont par ailleurs été placées en garde à vue le 26 septembre, a appris l'AFP de source judiciaire. «Le petit frère du principal suspect» a été interpellé dans le Val-d'Oise et placé en garde à vue, ainsi qu'un homme «dans l'environnement relationnel» de l'assaillant présumé, a-t-on indiqué de même source.

Un Algérien qui a tenté de s'interposer arrêté puis libéré

Un autre homme, un Algérien de 33 ans, arrêté dans l'après-midi du 25 septembre, a lui été relâché dans la soirée. Il a été mis hors de cause, son avocate Lucie Simon expliquant au Parisien que ce dernier avait été témoin de l'attaque et avait «voulu s'interposer». 

Selon une source proche du dossier, son récit qui «consiste à dire qu'il a été témoin, a poursuivi l'auteur et a ensuite été menacé, a été corroboré par l'enquête». Sur Twitter, son avocate a évoqué un «jeune homme héroïque qui a tenté d'arrêter l'assaillant». «Il s'est présenté à la police pour témoigner, on l'a menotté, cagoulé devant les caméras, placé en garde à vue malgré les témoins et les vidéos. Il sort ce soir épuisé et choqué», explique l'avocate.

La pronostic vital des victimes n'est pas engagé

Le Parquet national antiterroriste (PNAT) s’est très vite saisi du dossier le 24 septembre, en ouvrant une enquête pour «tentative d’assassinat en relation avec une entreprise terroriste, association de malfaiteurs terroriste criminelle».

Le lieu hautement symbolique de l’attaque et son déroulé en plein procès des attentats de Charlie Hebdo de janvier 2015 ont participé à la saisine du PNAT. Lors d’une brève allocution publique le 24 septembre, le président du PNAT Jean-François Ricard a en outre souligné «la volonté manifeste de l’auteur d’attenter à la vie de deux personnes dont il ignorait tout et qui se trouvaient à ce moment-là simplement en pause cigarette». La brigade criminelle de Paris et la direction générale de la sécurité intérieure (DGSI) sont chargées des investigations.

L'attaque a fait deux blessés grave une femme et un homme de 28 et 32 ans, salariés de Premières Lignes, une société de production qui travaille notamment avec France 2 pour l’émission «Cash Investigation», et de Bocode Studios, une société de postproduction, dont les locaux se situent dans le même immeuble que l’ancienne rédaction de Charlie Hebdo.

Les membres de Premières Lignes avaient été les premiers témoins de l’assaut du 7 janvier 2015, qui s’était déroulé sur le palier d’en face. «La plupart des collaborateurs de Première Ligne ont déjà vécu l'attaque des frères Kouachi de Charlie Hebdo il y a cinq ans, ça a été un traumatisme extrêmement profond pour toute l'équipe. Revivre un peu plus de cinq ans après une attaque [...] ça réveille des craintes, des traumatismes», a rappelé la journaliste Elise Lucet sur France 2 le 24 septembre. 

Le Premier ministre Jean Castex, qui s'est rendu sur les lieux avec le ministre de l'Intérieur le 24 septembre, a affirmé sa «volonté résolue, par tous les moyens, de lutter contre le terrorisme», précisant à propos des deux victimes que leurs vies n'étaient pas en danger.