Une déclaration de Gérald Darmanin hostile à «l'ensauvagement d'une certaine partie de la société» dans un entretien au Figaro le 24 juillet a fait réagir la classe politique.
Déplorant une «crise de l’autorité», le ministre de l'Intérieur avait déclaré qu'il fallait «stopper l’ensauvagement d’une certaine partie de la société».
«Il faut réaffirmer l’autorité de l’Etat, et ne rien laisser passer», avait-il ajouté à la veille d'un déplacement à Nice sur le thème de l'insécurité en compagnie du Premier ministre Jean Castex et du ministre de la Justice Eric Dupond-Moretti.
«Ma vision est celle des Français de bon sens : les policiers et les gendarmes nous protègent, et ils courent derrière les voyous. Le rôle du ministère de l’Intérieur, c’est de protéger ceux qui nous protègent, et de les aider à courir derrière les voyous», a-t-il par ailleurs estimé dans l'entretien au cours duquel il a aussi abordé la lutte contre l'islamisme et les «séparatismes».
Un terme connoté ?
Sitôt utilisé, le terme d'«ensauvagement» employé par un ministre de l'Intérieur a fait réagir dans le débat public, au motif que le terme serait selon ses détracteurs associé à l'ultra-droite.
«On peut vouloir rétablir la sécurité sans utiliser une expression comme "l'ensauvagement de la société", popularisée par la droite de la droite», a réagi le député Matthieu Orphelin sur Twitter.
Même constatation chez le député ex-LREM Aurélien Taché, qui a estimé que reprendre le terme d'«ensauvagement» était une «concession majeure faite à l'extrême droite».
«Ce concept lie implicitement la montée de la violence à celle de l'immigration, la décadence au métissage de la société», a-t-il notamment écrit.
«Je n'aime pas ce mot dans la bouche d'un ministre de l'Intérieur, parce qu'il est à connotation», a estimé encore Eduardo Rihan-Cypel, conseiller national du Parti socialiste, sur BFM-TV. «On peut très bien signifier et lutter contre la délinquance et la criminalité sans créer des problèmes de langage qui vont insulter ou faire passer les gens pour des sauvages, pour des êtres primaires ou des non-humains», a condamné cet ancien député de Seine-et-Marne.
Tout autre accueil en revanche de la part du syndicat de police Synergie-Officiers, que l'emploi du terme par le ministre de l'Intérieur semble avoir satisfait.
«Il s’agit bel et bien d’un processus d’ensauvagement qui affecte tout le territoire national. C’est tout le socle républicain qui est ébranlé et le vivre-ensemble compromis a très court terme», a estimé l'organisation dans un tweet. «Aurelien Taché chouchoute son électorat préféré en niant les faits et en parlant de violences policières», a par ailleurs lancé le syndicat à l'encontre de l'élu.
Au RN, le mot est aussi apparu approprié à la situation, mais l'action du gouvernement visant à y remédier a suscité la méfiance. «Je suggère vivement à Gérald Darmanin de ne pas se contenter, comme ses prédécesseurs, de reprendre nos constats, mais plutôt de mettre en place nos solutions», a déclaré Marine Le Pen ce 25 juillet sur Twitter, accompagnant sa phrase du mot-dièse «ensauvagement».
L'ancien frontiste et président du parti Les Patriotes Florian Philippot a lui aussi réagi à ces propos : «Il y a 7 ans et demi j’évoquais "l’ensauvagement" de notre pays. Peu à peu d’autres politiques le reprenaient. Il a fallu tout ce temps pour qu’un ministre de l’Intérieur l’adopte enfin. Reste maintenant à agir», a-t-il écrit sur le réseau social.
Nicolas Dupont-Aignan a qualifié quant à lui les annonces gouvernementales, survenues à la suite de la visite du Premier ministre à Nice, de «mesurettes» revenant à donner de «l’aspirine pour une infection grave», tout en joignant le hashtag #ensauvagement à son tweet.