Le Conseil d'Etat a enjoint le 18 mai l'Etat de cesser «sans délai» d'utiliser des drones à Paris pour surveiller le respect des règles du déconfinement, en raison de l'absence de cadre juridique pour l'utilisation de ces dispositifs techniques.
Pour la plus haute juridiction administrative, l'usage de ces drones, dans ces conditions, «caractérise une atteinte grave et manifestement illégale au droit au respect de la vie privée». Le Conseil d'Etat met en avant les «risques d’un usage contraire aux règles de protection des données personnelles».
Le Conseil d'Etat était saisi d'un recours de la Ligue des droits de l'Homme (LDH) et de la Quadrature du Net.
Au cours de l'audience le 15 mai, il a beaucoup été question de la possibilité d'identifier les personnes filmées sur la voie publique.
Pour le ministère de l'Intérieur et la Préfecture de police de Paris, cette identification n'est pas l'objectif visé avec l'usage de ces appareils : les drones permettraient de repérer des rassemblements interdits afin de déployer des forces de l'ordre pour disperser les personnes regroupées.
Le juge administratif n'a pas remis cet élément en question mais a pris sa décision sur la base de la capacité d'identifier les personnes et donc du risque de mésusage.
Afin de pouvoir utiliser ces drones en toute légalité, il faudra soit un arrêté pour encadrer leur usage, pris après avis de la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL), soit doter les appareils utilisés par la Préfecture de police de Paris de dispositifs techniques rendant impossible l'identification des personnes filmées.
L'avocat de la LDH Patrice Spinosi a salué «la volonté du Conseil d'Etat de marquer son attachement aux libertés fondamentales» et a ensuite expliqué qu'«il n'y [avait] aucune raison de penser que cette décision n'ait pas vocation à s'appliquer sur l'ensemble du territoire français», soulignant qu'aucun cadre juridique n'existe pour l'utilisation de ces drones.